La Société Française d’Ecologie et d’Evolution (SFE2) vous propose ce regard d’un collectif de chercheurs en écologie et évolution, mené par Jean-Baptiste André (Directeur de Recherche à l’ENS, Paris), sur les failles de la diffusion scientifique dans ces domaines.
MERCI DE PARTICIPER à ces regards et débats sur la biodiversité en postant vos commentaires et questions sur les forums de discussion qui suivent les articles; les auteurs vous répondront.
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La couverture médiatique d’un essai sur l’évolution
révèle des défaillances dans la diffusion de l’information scientifique
Texte collectif, Jean-Baptiste André et al.
Regard édité par Sébastien Barot et Anne Teyssèdre
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Mots clefs : Evolution biologique, consensus scientifique, pratiques journalistiques, désinformation, biais cognitifs, sophisme naturaliste, la survie des médiocres, Daniel Milo
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- (Introduction )
- Un bref rappel du consensus scientifique de l’évolution
- Trois règles simples pour un traitement rigoureux de la science dans les médias
- Conclusion
- Signataires
- Bibliographie
- Regards connexes
- Forum de discussion
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(Introduction)
Nous sommes spécialistes de l’évolution, spécialistes de l’étude des fausses informations, spécialistes de l’éducation, et plus largement, scientifiques soucieux de la manière dont nos travaux sont communiqués. Nous souhaitons exprimer ici notre profonde préoccupation face à la couverture médiatique massive d’un livre récent de Daniel Milo portant sur l’évolution et intitulé La survie des médiocres. Critique du darwinisme et du capitalisme (Gallimard), et proposer également quelques principes simples pour le traitement des informations scientifiques dans les médias, afin de prévenir à l’avenir des cas similaires de désinformation.
Un bref rappel du consensus scientifique sur l’évolution
Rappelons ici les bases du consensus scientifique sur l’évolution (le lecteur intéressé pourra consulter l’ouvrage collectif de référence en français : Lefevre et al., 2016). Les organismes vivants actuels sont le produit d’un processus de changement graduel, l’évolution, résultant de trois forces principales agissant sur la structure génétique des populations : la mutation, la dérive génétique et la sélection naturelle. La mutation et la dérive génétique sont des forces aléatoires. La sélection naturelle est une force directionnelle qui tend à faire augmenter dans les populations la fréquence des gènes permettant aux individus de se reproduire plus efficacement dans leur environnement, ce qui implique de résoudre une diversité de problèmes (p. ex. acquérir des ressources, éviter les prédateurs, lutter contre les infections, etc).
C’est donc la sélection naturelle qui explique que les organismes vivants soient adaptés à leur environnement. Pour autant, l’évolution ne produit pas des organismes vivants “parfaits” et cela pour quatre raisons essentielles. Premièrement, le caractère aléatoire de la mutation et de la dérive génétique éloigne le résultat de l’évolution d’un quelconque optimum. Deuxièmement, la sélection naturelle fonctionne comme un bricoleur qui trouve des solutions par tâtonnements, plutôt que comme un ingénieur qui planifie une solution optimale, pour reprendre les termes de François Jacob (prix Nobel de médecine 1965). Troisièmement, la sélection naturelle agit sur une multitude de dimensions partiellement incompatibles entre elles. Il n’existe donc aucune fonction spécifique dans laquelle un organisme soit “le meilleur possible”.
Par exemple, un investissement parental élevé augmente la probabilité de survie de chaque descendant mais nécessite de limiter la taille des portées, un cerveau plus gros offre des avantages cognitifs mais implique un temps de développement plus long, etc. Tout est affaire de compromis. Enfin, la sélection naturelle agit à l’échelle du gène plutôt qu’à l’échelle de l’individu, engendrant parfois des effets apparemment paradoxaux : l’évolution de caractères nuisibles pour les individus eux-mêmes, ou bien de caractères altruistes par lesquels les individus sacrifient une partie de leur succès reproducteur au bénéfice d’autres individus.
Par rapport à ce consensus, Milo n’apporte aucune innovation solide et commet même des erreurs assez évidentes. Par exemple, il s’étonne de la médiocrité apparente des organismes vivants, sans comprendre correctement qu’elle résulte très souvent de compromis évolutifs. Il commet l’erreur, courante chez les non-spécialistes, de croire que ce sont les espèces, prises collectivement, qui sont en compétition les unes contre les autres (“les girafes” contre “les éléphants”), alors que la compétition s’opère au niveau des individus et même des gènes. Enfin, son exemple phare attribuant la mortalité des girafons à leur chute à la naissance est grossièrement faux : les études de terrain, qu’il ne cite pas, montrent que cette mortalité est du même ordre de grandeur que chez les autres ongulés et qu’elle est principalement due à la prédation, et non à des accidents périnataux (Owen‐Smith et Mason, 2005 ; Lee et al. 2017).
Mais notre objectif ici n’est pas de produire une critique détaillée de son livre (plusieurs critiques en ont été publiées, vers lesquelles nous renvoyons le lecteur : Radick, 2019 ; Morris, 2020 ; Veuille, 2024). Notre objectif ici est plutôt de partager notre préoccupation quant à l’ampleur et la substance de l’écho médiatique qu’il a suscité. Malgré ses lacunes flagrantes, aisément détectables par tout spécialiste de l’évolution, Le Monde, Le Figaro, Libération, Le Nouvel Observateur, France Culture, ont tous fait des comptes-rendus élogieux de l’essai de Milo, soulignant systématiquement deux points : (i) le fait qu’il remettrait en cause le consensus scientifique sur l’évolution et (ii) les implications politiques que l’on devrait en déduire. Le Monde a même publié un second article sur cet essai, dont le titre “[…] et si Darwin avait tout faux” est particulièrement choquant. Que dirait-on si le même journal faisait le compte-rendu d’un ouvrage climatosceptique sous le titre « Et si les climatologues avaient tout faux » ?
Une telle couverture médiatique unanimement élogieuse révèle de sérieuses failles dans les pratiques journalistiques sur les sujets scientifiques. Notre objectif ici est donc non seulement de dénoncer ce cas de désinformation, mais aussi d’encourager une réflexion sur ces pratiques pour prévenir de futurs cas similaires.
Trois règles simples pour un traitement rigoureux de la science dans les médias
La communication scientifique dans les médias grand public doit nécessairement reposer en partie sur la confiance. La majorité des journalistes, comme leurs lecteurs, ne peuvent pas comprendre en profondeur, ni juger par eux-mêmes de la validité d’un résultat ou d’un discours scientifique, pas plus en biologie de l’évolution qu’en physique ou en climatologie. Ils sont donc inévitablement obligés de faire confiance à certains discours, plutôt qu’à d’autres, sans les comprendre entièrement. La question est donc de savoir s’ils sont bien armés pour accorder leur confiance de manière judicieuse. Pour cela, nous souhaitons proposer ici trois règles simples qui permettent de réduire le risque d’erreur.
Règle 1 : Calibrer sa confiance selon le niveau de la preuve
En tant que système de production de connaissances, la science s’approche de la réalité de manière certes imparfaite, mais plus efficacement que toute autre activité humaine grâce à son fonctionnement autocorrectif. De façon simplifiée, dans les sciences dites dures, ce fonctionnement s’articule autour de deux étapes : (i) chaque étude scientifique est d’abord évaluée par des spécialistes indépendants avant d’être publiée dans une revue dite “à comité de lecture” puis, (ii) une fois publiée, elle est souvent soumise à des critiques et des réplications par d’autres équipes de recherche. Les résultats scientifiques peuvent donc être classés en trois niveaux de preuve : (1) Niveau de preuve faible : un texte ou propos non publié dans une revue à comité de lecture, par exemple un livre ou une conférence. (2) Niveau de preuve intermédiaire : une unique étude publiée dans une revue à comité de lecture. (3) Niveau de preuve élevé : un résultat répliqué et publié dans des revues à comité de lecture par plusieurs équipes de recherches indépendantes.
Règle 2 : Exiger un niveau de preuve proportionnel à la distance au consensus
Plus un travail scientifique prétend s’opposer au consensus scientifique existant, autrement dit plus il est “extraordinaire”, plus le niveau de preuve exigé doit être élevé, parce qu’il existe un grand risque qu’un résultat soit faux quand il va à l’encontre de milliers de travaux scientifiques antérieurs. Ceci n’implique pas que le consensus scientifique soit immuable. Il est amené à changer, mais ce changement ne résulte pas d’une seule étude, surtout si elle n’est pas publiée, mais de l’accumulation de preuves d’un niveau de plus en plus élevé.
Règle 3 : Se méfier des biais cognitifs, et en particulier du sophisme naturaliste
Même s’ils respectent les deux premières règles ci-dessus, les journalistes auront inévitablement des préférences pour certains travaux scientifiques plutôt que d’autres. Il est donc crucial qu’ils reconnaissent que leurs préférences peuvent être biaisées. Prendre conscience de ses propres biais cognitifs est indispensable à tout travail de diffusion des connaissances.
Dans le cas de la théorie de l’évolution, un biais cognitif majeur est le “sophisme naturaliste” (naturalistic fallacy, en anglais). Il consiste en l’erreur logique de conclure qu’un phénomène observé dans la nature est nécessairement désirable moralement, simplement parce qu’il est naturel. Si un mécanisme compétitif comme la sélection naturelle joue un rôle important dans la nature, alors la compétition serait nécessairement moralement souhaitable en toutes circonstances. En conséquence, si on est moralement opposé à la compétition alors on préférera adhérer et diffuser des travaux scientifiques qui semblent remettre en cause le rôle de la sélection naturelle. Ce biais contribue certainement au fait que les théories qui prétendent remettre en cause la théorie darwinienne de l’évolution ont souvent joui d’un succès médiatique disproportionné par rapport à leur importance scientifique réelle.
Il est crucial ici de rappeler que le sophisme naturaliste n’a aucune base rationnelle. Il n’existe aucun lien logique entre la théorie de l’évolution et les idéologies anti-humanistes, telles que le darwinisme social, qui ne font que détourner cette théorie à leur profit. Il n’est donc pas nécessaire de contester la théorie de l’évolution pour les combattre.
Sur ces trois règles, l’essai de Milo a “tout faux”. (1) C’est un livre qui présente des idées jamais publiées dans des revues à comité de lecture (ce que les journalistes peuvent facilement vérifier en recherchant les publications de Daniel Milo dans les bases de données bibliographiques en ligne). Il s’agit donc du plus bas niveau de preuve scientifique. (2) Il se présente ouvertement comme remettant en cause un consensus scientifique. (3) C’est un cas d’école de sophisme naturaliste puisque Milo présente lui-même son essai comme une critique à la fois du darwinisme et du capitalisme, comme si accorder sa confiance épistémique à la théorie moderne de l’évolution impliquait nécessairement d’accorder sa confiance morale au capitalisme.
Conclusion : la rigueur scientifique est indispensable à la confiance dans les médias
Si les journalistes avaient respecté les trois règles simples ci-dessus, l’essai de Milo aurait allumé tous les signaux d’alarme, les incitant à la plus grande vigilance et leur permettant de filtrer correctement l’information. Plusieurs médias, notamment Le Monde et Le Nouvel Observateur, ont publié après coup des correctifs à leurs articles initiaux, mais il aurait été bien préférable qu’ils effectuent correctement ce filtrage dès le départ. A défaut, le danger est immense : le public finira par perdre confiance, soit dans la science, soit dans les médias. Si Le Monde, Le Figaro, Libération, Le Nouvel Observateur, Radio France etc. relayent de fausses informations, que dire ensuite aux élèves, aux jeunes, à l’ensemble de la société ? Aucun.e enseignant.e ou scientifique ne peut affirmer publiquement que tous ces grands médias se trompent sans contribuer à éroder la confiance du public dans ces sources d’information, une confiance pourtant vitale pour le bon fonctionnement de nos sociétés. Pour conserver cette confiance, les grands médias doivent donc faire preuve de rigueur et d’intégrité dans tous les domaines, y compris dans l’information scientifique.
Bibliographie
- Lee D. E., M. L. Bond & D. Bolger, 2017. Season of birth affects juvenile survival of giraffe. Population Ecology, 59(1), 45‑54.
- Lefevre T., M. Raymond & F. Thomas (Eds), 2016. Biologie Evolutive. De Boeck Supérieur.
- Morris S.G., 2020. Good enough: The tolerance for mediocrity in nature and society, by Daniel S. Milo. Quarterly Review of Biology 95, 79-80.
- Owen‐Smith N. & D. R. Mason, 2005. Comparative changes in adult vs. Juvenile survival affecting population trends of African ungulates. Journal of Animal Ecology, 74(4), 762‑773.
- Radick G., 2019. So many free lunches: Why we should not try to be excellent. Times Literary Supplement 6085, 36.
- Veuille M., 2024. Une girafe dans la superstructure. AOC. 27 Mai 2024. https://aoc.media/analyse/2024/05/26/une-girafe-dans-la-superstructure/
Regards connexes :
- Regards sur l’évolution : https://sfecologie.org/tag/evolution/
- J. Tassin, P. Donadieu, AAF, 2018. Trois Regards sur le livre de P. Wohllebenen, La Vie secrète des arbres. Regards et débats sur la biodiversité, SFE, Regard RO5, mars 2018.
- Regards sur la communication : https://sfecologie.org/tag/communication/
Signataires (par ordre alphabétique)
- Guillaume Achaz Professeur Université Paris-Cité, Centre Interdisciplinaire de Recherche en Biologie, Collège de France et Institut de Systématique, Evolution, Biodiversité, Muséum Nationnal d’Histoire Naturelle
- Jean-François Agnèse Directeur de Recherche IRD, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier
- Samuel Alizon Directeur de Recherche, Centre Interdisciplinaire de Recherches en Biologie, CNRS
- Alexandra Alvergne, Chargée de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier
- Jean-Baptiste André Directeur de Recherche CNRS, Institut Jean Nicod, Ecole Normale Supérieure – PSL
- Adeline André Docteure en biologie de l’évolution
- Sophie Arnaud-Haond Ifremer, UMR Marbec – Université de Montpellier, Ifremer, IRD, CNRS; Sète & Montpellier
- Didier Aurelle Maître de Conférences, Institut Pythéas, Aix-Marseille Université
- Alice Baniel Chargée de recherche IRD, Equipe Anthropologie Evolutive, Institut des Sciences de l’Évolution de Montpellier (ISEM)
- Mélodie Bastian Doctorante, Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive, Université Lyon 1
- Nicolas Baumard Directeur de recherche CNRS, Institut Jean-Nicod, Ecole normale supérieure-PSL
- Godelle Bernard Professeur des universités, Institut des sciences de l’évolution-Montpellier, Université de Montpellier
- Etienne Bezault Maître de Conférence, Laboratoire Biologie des Organismes et Ecosystèmes Aquatiques (BOREA), Université des Antilles
- Nicolas Bierne Directeur de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier – CNRS
- Sylvain Billiard Professeur, Laboratoire Evolution-Ecologie-Paleontologie, Université de Lille
- Louis-Marie Bobay Assistant Professor, Bioninformatics Research Center, North Carolina State University
- François Bonhomme Directeur de Recherche émérite, Institut des Sciences de l’Evolution, Montpellier
- Laure Bonnaud-Ponticelli Muséum National d’Histoire Naturelle
- Philippe Borsa Directeur de recherche, Génétique des populations, Institut de Recherche pour le Développement, Montpellier
- Titouan Bouinier Doctorant, Collège de France
Ignacio Bravo Directeur de Recherche CNRS, Laboratoire MIVEGEC, Montpellier - Nicolas Bredèche Professeur des Universités, Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique, Sorbonne Université
- Carine Brouat Directrice de Recherche IRD, Centre de Biologie pour la Gestion des Populations – Montpellier
- Frédéric Brunet Ingénieur de Recherche Hors-Classe, Institut de Génomique Fonctionnelle, ENS de Lyon
- Judith Burstin Directrice de Recherche, Agroécologie, INRAE, Dijon
- Emmanuelle Cam Laboratoire de l’environnement Marin, Université de Bretagne Occidentale
- Solène Cambreling Doctorante, Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive, Université Lyon 1
- Didier Casane Professeur des universités, Institut Diversité Écologie et Évolution du Vivant, Université Paris-Cité
- Vincent Castric Directeur de recherche CNRS, Laboratoire Evolution-Ecologie-Paleontologie, CNRS, Université de Lille
- Elodie Chapuis Chargée de Recherche IRD, Laboratoire MIVEGEC, Montpellier
- Anne Charmantier Directrice de Recherche CNRS, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
- Marie Charpentier Directrice de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’ Evolution de Montpellier, Université de Montpellier
- Anne Chenuil Directrice de recherches CNRS, Equipe Biologie écologie et évolution moléculaires, Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie marine et continentale, Aix Marseille Université
- Marie-Charlotte Cheutin Post doctorante, Institut de Recherche sur la Biologie de l’insecte, CNRS, Université de Tours
- Coralie Chevallier Directrice de recherche INSERM, Institut Jean-Nicod, Ecole normale supérieure-PSL
- Bruno Colas Professeur AgroParisTech, Ecologie Systématique et Evolution, Université Paris-Saclay, CNRS, AgroParisTech.
- Fabien Condamine Chargé de recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier
- Marion Cordonnier Postdoctorante, University of Regensburg, Allemagne
- Franck Courchamp Directeur de Recherche CNRS, Laboratoire Ecologie, Systématique & Evolution, Université Paris Saclay
- Laure Danilo Conservatrice responsable du Muséum d’Orléans pour la Biodiversité et l’Environnement, Présidente de l’Amcsti, réseau national des professionnel.les de la culture scientifique, technique et industrielle
- Damien de Vienne Chargé de Recherche CNRS, Laboratoire de Biométrie et Biologie Évolutive, CNRS, Université Claude Bernard Lyon 1
- Dominique de Vienne Professeur émérite, Référent déontologue/lanceur d’alerte de l’Université Paris-Saclay, GQE-Le Moulon, Institut Diversité, Écologie et Évolution du Vivant (IDEEV), Université Paris-Saclay
- Franck Dedeine Maître de conférences, Institut de Recherche sur la Biologie de l’Insecte, CNRS / Université de Tours
- Sidney Delgado Maitre de conférences, Equipe Homologie, Institut de Systématique Évolution Biodiversité, Muséum National d’Histoire Naturelle, Sorbonne Université
- Frantz Depaulis Chargé de recherche CNRS, institut de Biologie, Ecole normale supérieure- PSL
- Yves Desdevises Professeur des Universités, Directeur, Observatoire Océanologique de Banyuls-sur-Mer, Sorbonne Université
- Christophe Destombe Professeur des universités, Laboratoire Adaptation et Diversité en Milieu Marin, CNRS, Sorbonne Université
- Céline Devaux Maitre de Conférences, Institut des Sciences de l’Evolution-Montpellier, Université de Montpellier
- Yann Dorant Chargé de Recherche IFREMER, Laboratoire Santé et services des écosystèmes Polynésiens
- Claudie Doums Directrice d’Etudes EPHE, Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, Muséum National d’Histoire Naturelle
- Mathilde Dufay Professeure des universités, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive, Université de Montpellier
- David Duneau Chercheur, Queen’s Medical Research Institute, Université d’Edimbourg
- Lise Dupont Professeure des universités, Institut d’écologie et des sciences de l’environnement de Paris, Université Paris-Est Créteil
- Ludovic Duvaux Ingénieur de Recherche INRAE, Unité Biodiversité Gènes et Communautés, INRAE-Université de Bordeaux
- Eric Elguero Ingénieur de Recherche, IRD, Laboratoire MIVEGEC, Montpellier
- Gilles Escarguel Maître de Conférences, Laboratoire d’Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés, Université Lyon 1
- Jean-Baptiste Ferdy Professeur, Centre de Recherche sur la Biodiversité et l’Environnement (CRBE), Université Paul Sabatier – Toulouse III
- Nicolas Ferry Chercheur Post-doctorant, Département du Suivi du Parc National et de Gestion de la Faune, Parc National de la Forêt Bavaroise
- Gilles Fischer Directeur de Recherche CNRS, Laboratoire de Biologie Computationnelle et Quantitative, Sorbonne Université
- Marion Fischer-Le Saux Chargée de recherche INRAE, Institut de Recherche en Horticulture et Semences
- Adrien Frantz Maître de Conférences, Institut d’Ecologie et des Sciences de l’Environnement, Sorbonne Université
- Nicolas Galtier Directeur de Recherche CNRS, Institut des sciences de l’évolution-Montpellier, Université de Montpellier
- Sylvain Gandon Directeur de Recherche CNRS, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
- Bertrand Gauffre Chargé de recherche INRAE, Laboratoire Plantes et Systèmes de cultures Horticoles, INRAE-Avignon
- Anne Genissel Chargée de recherche INRAE, Université Paris Saclay
Félix Geoffroy Chargé de recherche, Société Nationale de Protection de la Nature - Pierre Gérard Maître de Conférences, Génétique Quantitative et Evolution, Institut Diversité Écologie et Évolution du Vivant Paris-Saclay, AgroParisTech
- Camille Girard-Tercieux Ingénieure agronome et docteure en écologie-biodiversité, Enseignante non-permanente en écologie et agronomie à l’École Supérieure des Agricultures
- Sylvain Glémin Directeur de Recherche CNRS, Laboratoire Ecosystèmes – Biodiversité – Evolution, Université de Rennes – CNRS
- German Gonzalez-Davila Directeur Executif, Centro Interdisciplinario de Biodiversidad y Ambiente A. C. (CeIBA), Mexique
- Laurent Granjon Directeur de Recherche, Centre de Biologie pour la Gestion des Populations, IRD, Montpellier
- Anne-Céline Granjon sDiv-Synthesis center, German Center for Integrative Biodiversity Research (iDiv) Halle-Jena-Leipzig
- Philippe Guillet Directeur du Muséum de Nantes
- Thomas Heams Maître de conférences AgroParisTech, Génétique, Elevage et Reproduction
- Philipp Heeb Directeur de Recherches CNRS, Centre de Recherche en Biodiversité et Ecologie, Université de Toulouse
- Quentin Helleu Maître de Conférence MNHN, Laboratoire Structure et Instabilité des Génomes, Muséum National d’Histoire Naturelle.
- Elise Huchard Directrice de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier & CNRS
- Kaufmann Joshka Chercheur, Marine Institute Newport Long Term Ecological Research Centre, Marine Institute (Irlande)
- Jérémy Just Ingénieur de rechercche CNRS, Laboratoire Reproduction et développement des plantes, École normale supérieure de Lyon
- Pierrick Labbé Professeur des Universités, Membre honoraire de l’IUF, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier
- Sébastien Lavergne Directeur de recherches CNRS, Laboratoire d’Ecologie Alpine, Université Grenoble Alpes
- Céline Le Bohec Directrice de Recherche CNRS, Institut Pluridisciplinaire Hubert Curien Strasbourg, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive Montpellier
- Yvan Le Bras Muséum national d’histoire naturelle, unité PatriNat (OFB-MNHN-CNRS-IRD), Station marine de Concarneau
- Raphael Leblois Chargé de recherche INRAE, Centre de Biologie pour la Gestion des Populations CBGP, INRAE-Montpellier
- Jean-Baptiste Ledoux Chercheur Auxiliaire, Centre Interdisciplinaire de Recherche Marine et Environnementale, Fondation pour la Science et la Technologie (Portugal)
- François Lefèvre Directeur de Recherche, Ecologie des Forêts Méditerranéennes, INRAE, membre de l’académie d’agriculture
- Christophe Lemaire Maitre de conférences, Institut de Recherche en Horticulture et Semences, Université d’Angers
- Thierry Lengagne Chercheur CNRS, laboratoire LEHNA, Université Lyon 1
- Thomas Lenormand Directeur de Recherche CNRS, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
- Julien Lie-Panis Post-doctorant, Groupe dynamiques du comportement social, Institut Max Planck de biologie évolutionnaire
- Lucas Lucas Docteur, Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive, Université Lyon 1
- Florian Massip Chargé de recherche, Centre de Bioinformatique, Mines de Paris, Institut Curie
- Hugo Mathé-Hubert Enseignant en Bio-statistiques, LECA, Université de Grenoble
- Adèle Mennerat Professeure associée, Université de Bergen (Norvège)
- Frédéric Menu Professeur des Universités, Laboratoire Biométrie et Biologie Evolutive, Université Claude Bernard Lyon1
- Hugo Mercier Directeur de recherche CNRS, Institut Jean-Nicod, Ecole normale supérieure-PSL
- Clément Mettling Institut de Génétique Humaine, CNRS, Université de Montpellier
- Nicolas Morel Responsable de la conservation des musées du Mans
- Thibaut Morel-Journel Maître de conférences, Laboratoire Infection, anti-microbien, modélisation, évolution, Université Sorbonne Paris Nord
- Olivier Morin Chargé de recherche CNRS, Institut Jean-Nicod, Ecole normale supérieure-PSL
- Alice Namias Post doctorante, Ecologie, Systématique et Evolution, IDEEV Université Paris-Saclay
- Olga Otero Professeure des Universités, UMR CNRS-UP Palevoprim, Université de Poitiers
- Christine Paillard Directrice de Recherche CNRS, Laboratoire des sciences de l’environnement Marin, LEMAR, IUEM UBO
- Sophie Pantalacci Directrice de Recherche CNRS, Ecole Normale Supérieure de Lyon
- Andréa Pares Conservatrice du Muséum départemental du Var et docteur en archéobotanique
- Elena Pasquinelli Fondation la Main à la Pâte, Institut Jean Nicod
- Damien Picard Maitre de conférence, Laboratoire Biodivag, département de biologie, université d’Angers
- Christian Pichot Chargé de Recherche INRAE, Laboratoire Ecologie des Forêts Méditerranéennes (Avignon)
- Christophe Plomion Directeur de Recherche, Unité Biodiversité Gènes et Communautés, INRAE-Université de Bordeaux
- Jean-Marc Pons Maître de conférence HC (retraité), Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, Muséum national d’Histoire naturelle
- Geneviève Prévost Professeure des Universités, Unité de recherche Ecologie et Dynamique des Systèmes Anthropisés, Université de Picardie Jules Verne, Amiens
- Sébastien Puechmaille Maître de conférences, Membre Junior de l’Institut Universitaire de France, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier
- Benoit Pujol Directeur de Recherche CNRS, vice président sciences & société et transition écologique de l’Université Perpignan Via Domitia, Laboratoire CRIOBE, CNRS et Université Perpignan Via Domitia
- Loïc Quevarec Chercheur Post-doctorant CNRS, Laboratoire de Chimie Bactérienne, Institut de Microbiologie de la Méditerranée
- Franck Ramus Directeur de recherche CNRS, Laboratoire de sciences cognitives et psycholignuistique, Ecole Normale Supérieure-PSL
- Anthony Ravel Docteur en paléontologie et professeur certifié des SVT, Collège Charles Péguy (Paris 19)
- Michel Raymond Directeur de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier.
- Guislaine Refregier Maitre de conférences, Laboratoire Ecologie Systématique et Evolution, Université Paris-Saclay
- Lauric Reynes School of Life Sciences, University of Hawai‘i, Honolulu, Hawai‘i, USA
- Thierry Rigaud Directeur de Recherche au CNRS, Laboratoire Biogéosciences, Université de Bourgogne
- Ana Rivero Directrice de Recherche CNRS, Laboratoire MIVEGEC, Montpellier
- Eduardo Rocha Directeur de recherche CNRS, laboratoire Génétique des Génomes, Institut Pasteur et CNRS
- Quentin Rougemont Post doctorant, Ecologie, Systématique et Evolution, IDEEV Université Paris-Saclay
- Lise Roy Maître de conférences, Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive, Université Paul-Valéry Montpellier 3
- Denis Roze Directeur de recherche CNRS, Laboratoire Adaptation et Diversité en Milieu Marin, CNRS, Sorbonne Université
- Alexa Sadier Chargée de Recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université de Montpellier
- Barot Sébastien Directeur de Recherche, Institut de Recherche pour le Développement, Institut d’Ecologie et des Sciences de l’Environnement-Paris
- Laure Segurel Chargée de Recherche CNRS, Laboratoire de Biométrie et de Biologie Evolutive, Université de Lyon 1
- Marc-André Selosse Professeur du Muséum national d’Histoire naturelle, professeur aux universités de Gdansk en Pologne et Kunming en Chine, membre de l’Institut universitaire de Franc
- Hugo Sentenac Postodoctorant, Centre de Biologie et Gestion des Populations, INRAE/CIRAD/IRD/Université de Montpellier, Laboratoire Chrono-Environnement Besançon
- Mathieu Sicard Professeur des universités, Institut des sciences de l’évolution-Montpellier, Université de Montpellier
- Olivier Tenaillon Directeur de Recherche Inserm, Equipe Robustesse et evolvabilité du vivant, Institut Cochin, Inserm, CNRS, Université Paris Cité
- Irene Till Directrice de Recherche CNRS, Laboratoire de Géographie Physique et Environnementale, Université Clermont Auvergne
- Myriam Valero Directrice de Recherche CNRS (émérite), Laboratoire Adaptation et Diversité en Milieu Marin, CNRS, Sorbonne Université
- Joan Van Baaren Professeure des Universités, Université de Rennes, Laboratoire ECOBIO Ecosystèmes, Biodiversité, Evolution
- Marc Vandeputte Ingénieur de Recherches, Marine Biodiversity Exploitation and Conservation, Palavas-les-Flots
- Michel Veuille PSL
- Frédéric Veyrunes Chargé de recherche CNRS, Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier, Université Montpellier
- Thierry Wirth Directeur d’Etudes à l’EPHE/PSL, Institut de systématique, évolution et biodiversité, MNHN. Titulaire d’une chaire Leibniz au centre de recherche Borstel, Leibniz Lung Center (Allemagne).
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Regard édité par Anne Teyssèdre et Sébastien Barot, mis en ligne par A.Teyssèdre le 20 juin 2024.
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L’espace des commentaires du Monde qui est généralement le théâtre de discussions de comptoir avait bénéficié d’une remarquable levée de boucliers de la communauté scientifique abonnée au journal. L’article y avait reçu une remarquable volée de bois vert.
J’exige un droit de réponse à ce manifeste contre mon modeste livre et le traitement qui lui est réservé dans les médias
Bonjour Monsieur Milo,
Oui bien sûr, vous pouvez soit poster des réponses assez brèves (20 lignes max) sur ce forum de discussion en ligne, soit nous envoyer un texte plus long qui pourra être mis en ligne à la suite de ce Regard.
Cordialement, A. Teyssèdre
Mr MILO (si c’est bien lui) manque encore une fois de modestie et de discernement en demandant un droit de réponse, ce « manifeste » n’étant pas comme il semble le croire à l’encontre de son livre, mais à l’encontre des grands journaux, Le Monde et autres, pour qui le sensationnalisme prime sur la rigueur et le professionnalisme. Peut être faudrait-il le lui rappeler ?
Bonjour,
Pour moi, prétendre corriger la théorie de l’évolution, théorie extrêmement robuste, quand on n’a pas de légitimité dans ce domaine scientifique très pointu, cela manque terriblement de modestie. Vous pourriez, par honnêteté intellectuelle, retirer votre livre des ventes. Dans ce cas, moi en tout cas je vous pardonnerai votre erreur, parce qu’elle est humaine et que nous sommes tous imparfaits – comme vous le dites très justement, sauf que la théorie de l’évolution ne dit pas le contraire. Par contre, si vous souhaitez défendre votre livre, vous vous enfoncerez.
Nous avons tous hâte de goûter la réponse de M. Milo. 🙂
Pour un complément cf
https://www.normalesup.org/~adanchin/causeries/formes-vivantes.html
et sur l’esprit critique et la réinvention de la roue (en anglais)
https://doi.org/10.1111/1751-7915.14315
Cette petite mise au point est remarquablement écrite ! Bravo et merci d’avoir la patience de réexpliquer (pour la Nieme fois) ce qu’est la science…
Passionnant mais désespérant ……
Post 1.
La direction m’autorise des posts d’une vingtaine de lignes chacun, c’est très généreux de sa part.
Un des fils conducteurs de cette série sera celui-ci : Pas lu ou mal lu ? Cette interrogation s’adresse à Jean-Baptiste André, l’auteur de la tribune, comme à ses Cent-Trente (!) signataires.
Exemple : « Milo commet l’erreur, courante chez les non-spécialistes, de croire que ce sont les espèces, prises collectivement, qui sont en compétition les unes contre les autres (“les girafes” contre “les éléphants”), alors que la compétition s’opère au niveau des individus et même des gènes. »
Si André avait (bien) lu le livre, il aurait découvert que la présumée lutte girafes vs. éléphants y est débattue parce que c’est une des hypothèses proposée par les spécialistes pour expliquer le long cou de la girafe une fois que le scénario canonique de Darwin s’est avéré problématique. Je rejette fermement cette hypothèse (La Survie de médiocres, pp. 71-72), pourtant André me l’attribue. Pas lu ou mal lu ? This is the question.
Soit dit en passant, la lutte interspécifque existe bel et bien, dans la littérature comme dans la nature, ainsi dans la course aux armements entre deux espèces (la guerre totale qu’Homo sapiens a déclarée au coronavirus SARS-CoV-2 n’est pas encore gagnée). Alors parler avec condescendance de mon ignorance est, comment le dire, peu galant.
A suivre
Post 2.
La tribune des Cent-Trente confond deux objets distincts, mon livre et sa couverture médiatique, comme s’ils ne faisaient qu’un. Cette confusion ontologique permet à Jean-Baptiste André de m’accuser – le mot n’est pas trop fort – de délits que moi-même je condamne dans le livre.
A suivre
Post 3
Vous m’accusez de n’être pas familier avec la littérature spécialisée (ou de ne pas l’avoir comprise). Si vous aviez (bien) lu le livre, vous auriez été stupéfiés par le nombre de pages où cette littérature est mentionnée, et parfois discutée – c’est mon droit – pour chaque thème abordé (exception faite de la mortalité infantile chez la girafe… mea culpa)
Comment juger de la qualité de la couverture médiatique d’un objet sans d’abord prendre connaissance de l’objet de cette couverture ? Pour vous économiser un pavé de 413 pages, vous pouvez vous contenter du deuxième chapitre, sur l’analogie de la domestication, et du sixième chapitre, sur les très larges gammes. Si votre appétit vient en mangeant, lisez chapitre 3, sur les Galapagos. L’annexe, « Pagaille moléculaire », risque de vous réserver quelques surprises.
Merci de cet article d’une clarté remarquable. La réponse de Daniel Milo confirme la pertinence de votre propos !
Monsieur Milo,
Merci pour vos commentaires. Je me permets d’y répondre en mon nom propre. Le texte a été élaboré en coordination avec l’ensemble de ses signataires, mais cette réponse est la mienne.
D’abord, ce texte ne porte pas sur votre livre. Seule m’importe sa couverture médiatique, parce qu’elle est révélatrice de deux problèmes généraux : (i) l’hostilité d’une partie des médias à la théorie de l’évolution et (ii) le déficit de formation des journalistes sur les pratiques de fact-checking dans le domaine scientifique.
Toutefois, bien évidemment, s’il s’agissait d’un bon livre, nous n’aurions pas écrit une tribune pour dénoncer le fait qu’il ait bénéficié d’une couverture médiatique louangeuse. Un mot, donc, sur son contenu. Je ne vous répondrai ici que sur le sujet de la sélection de groupe, dont vous vous défendez. Permettez-moi de citer un passage du livre (p. 71) : “Que la girafe l’ait emporté sur l’éléphant grâce à sa taille passe encore. Mais pourquoi par un écart de deux mètres, alors que cinquante centimètres lui auraient assuré une victoire sans appel?”. J’aurais pu citer aussi vos propos sur France Culture, très clairs aussi de ce point de vue.
Vous pouvez vous défendre de ces phrases, dire que ce n’est pas ce que vous avez voulu dire, que vous avez écrit d’autres passages dans lesquels vous parlez de la compétition intra- versus inter-spécifique, peu importe. Aucun évolutionniste sérieux ne s’exprimerait ainsi, parce que “les girafes” prises collectivement ne triomphent pas “des éléphants”. Ce que vous écrivez est à la fois faux et extrêmement maladroit.
Vous n’auriez pas publié un livre sous-titré “Une critique du Darwinisme et du capitalisme”, je ne vous en voudrais pas de cette maladresse. Je n’ai pas pour objectif de me moquer de quiconque exprime des propos maladroits, ou même faux, sur l’évolution, parce que manifestement il n’en est pas spécialiste. Le problème, c’est que vous l’avez commis, ce livre. Vous prétendez faire la critique de notre champ disciplinaire et fragilisez ainsi un pan entier de la connaissance déjà très massivement sous le feu de critiques malintentionnées venues de tout bord. Alors, non, vos maladresses et approximations de néophyte ne sont pas pardonnables.
Et vous pouvez trouver que nous sommes injustes d’attaquer si fortement votre « modeste » ouvrage, expliquer que la tonalité anti-darwinienne de sa couverture médiatique a dépassé vos intentions, et même que vous êtes, en fin de compte, une victime de l’intérêt que votre livre a suscité dans les médias.
Sauf que vous ne récoltez que ce que vous avez vous-mêmes semé. Personne ne vous a forcé à sous-titrer votre livre “Une critique du Darwinisme et du capitalisme”. Ce sous-titre accrocheur et démagogique vous a permis d’attirer l’intérêt des médias et de bénéficier de la sympathie malsaine qu’engendre toute critique de la théorie de l’évolution. Par contre, il faut choisir. Vous ne pouvez pas gagner sur les deux tableaux : attirer l’attention des médias et du public avec de la démagogie anti-darwinienne et en même temps bénéficier du respect de la communauté scientifique.
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« Vous pouvez vous défendre de ces phrases, dire que ce n’est pas ce que vous avez voulu dire, que vous avez écrit d’autres passages dans lesquels vous parlez de la compétition intra- versus inter-spécifique, peu importe. Aucun évolutionniste sérieux ne s’exprimerait ainsi, parce que “les girafes” prises collectivement ne triomphent pas “des éléphants”. Ce que vous écrivez est à la fois faux et extrêmement maladroit. »
En effet, aucun évolutionniste sérieux ne présenterait « les girafes triomphent/ou pas des éléphants »…
Néanmoins, vous semblez focaliser contre l’a compétition interspécifique comme si c’était une hérésie dogmatique. Vous le faites dans votre réponse ci-dessus et vous le faites plus explicitement dans l’article que vous « cosignez » avec 100 spécialistes.
Pourtant, si la sélection porte avant tout sur des phénotypes, caractères et comportements, aptitudes, d’individus, la compétition peut être aussi intraspécifique qu’interspécifique – au contraire de ce que vous proposez dans votre article, je vous cite : « alors que la compétition s’opère au niveau des individus et même des gènes ». .
Plus de 3500 publications sur pubmed avec critère « interspecific competition ».
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/?term=interspecific+competition
Souvent pour des plantes, qui « se bagarrent » rien que pour recevoir un peu de soleil, ou des parasites de diverses espèces pondus dans une même larve, etc.
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Vous vous présentez pourtant comme experts en évolution ? Jolie maladresse que de réfuter ainsi la compétition interspécifique.
Quant à votre affirmation que « la compétition s’opère au niveau des gènes »: cela fera plus de 50 ans que ni la sociobiologie de Wilson ni le génocentrisme de Dawkins n’ont réussi à démontrer que le « gène unité de sélection » n’est autre chose qu’un point de vue relativement intéressant – guère plus – de la sélection s’opérant en réalité sur les phénotypes ; qui eux seuls sont en contact matériel avec le « monde somatique », si vous me permettez l’expression. La dé-sélection des phénotypes entraînant, embarquant alors les gènes ou moitié des allèles du porteur. La sélection de l’individu étant systémique, elle embarque tous ses caractères génophénotypiques.
J’ai pris la métaphore du livre de Milo « la survie des médiocres », dans le sens bien expérimenté, observé, et plus que consensuel, de « la survie des pas triop inadaptés »… ce qui réfute l’idée princeps ancienne « de survie du plus apte ».
Pas de quoi fouetter un chat que de transformer « pas trop maladaptés » en « médiocres ».. L’idée étant d’écarter « les plus aptes » – maxime plus qu’écornée de nos jours.
Bonjour Mr Milo,
Si vous n’êtes pas satisfait des critiques faites à votre livre dans cette tribune (dont ce n’était, de ce que je comprends, pas vraiment l’objet), vous pouvez lire / regarder celles de Stéphane Debove : https://homofabulus.com/140-biologistes-en-colere-contre-un-livre-avis-sur-la-survie-des-mediocres-de-daniel-milo/
Cordialement,
Bonjour,
Non, il ne faut pas regarder cette vidéo. C’est juste deux gosses narcissiques qui se regardent parler en accusant tout le monde. Les éditeurs y seraient juste vénaux, les journalistes sourds, le public trop naïf pour comprendre seul. Ils ne connaissent pas Marx mais en parlent, ils ne lisent pas les articles du Monde mais les « repèrent », il parle de Milo en terme de probabilité et non comme à un autre humain, ils lui parlent même mais sans lui parler qu’ils disent. Enfin c’est vraiment affreux et n’aurait jamais dû être rendu public. Journalistiquement parlant c’est non éthique. Moralement c’est faux. Humainement c’est négatif.
Bonjour Camille,
Si vous prenez un jour le temps d’argumenter dans un article ou une vidéo votre recommandation de non visionnage (n’est-ce pas vous qui pensez ici que les gens ne pourront pas « comprendre seuls » ?), je lirai/regarderai avec attention. Pour celles et ceux que ça intéresse, Stéphane Debove a par ailleurs développé ses arguments dans une seconde partie : https://www.youtube.com/watch?v=hUFIvoiNetc
Sincèrement,
La seconde vidéo confirme mes dires. Le youtubeur d’ailleurs affirme lui-même que le livre de Milo n’est que le processus normal du monde des livres. Mais alors pourquoi cette tempête dans un verre d’eau? pour gratter un peu du buzz de Milo et placer son livre à lui. L’action final de ce youtubeur faisant claquer SON livre sur la table et défiant Milo (qui se moque de lui je pense) est puérile. Ce youtubeur fait les mêmes ereurs qu’il reproche à Milo (cherry picking des citations, moralisation à partir de la nature de la science alors que cette nature est par définition inexistante, construction d’un homme de paille, etc).
Mais surtout pourquoi légitime-t-il son agressivité par celle de Milo qui aurait commencé en premier. Il n’est pas obligé.
Puéril, non éthique, non humain. Je maintiens. Le public peut se passer de ces vidéos et se faire son idée par soi-même.
A mon avis, s’il fallait élire les plus médiocres youtubeurs évolutionnistes sur le web francophone, Stéphane Debove serait sur le podium. Comme avocat de la défense de l’evopsy… aux arguments pamphlétaires et digérés pour son fan club de convaincus qui boivent ses digressions approximatives, là oui il est compétent.
A déconseiller fortement concernant la Théorie de l’Evolution moderne. Stephane Debove se vautre dans d’interminables bavardages autour de modularité cérébrale de réponses comportementales, d’hypothétqiues design-fonction dont il n’arrive pas à fournir un seul exemple concret, et une compréhension extrêmement ultraadaptationniste de l’évolution, Dépassée depuis > 40 ans.
Excellent article.
Je vais me permettre d’apporter une tonalité différente dans mon commentaire : disons-le tout de go : je suis très déçu de la forme de cet article. Derrière la volonté (louable, mais qui enfonce quand même des portes ouvertes) de rappeler les règles de base de la solidité des papiers scientifiques, vous citez de façon vague et même un peu grossière le livre de D. Milo, et vous vous contentez de nous renvoyer à trois critiques, si nous désirons nous faire une idée quant au fond de cette affaire : quelles sont les faiblesses de cet ouvrage ? (Radick, 2019 ; Morris, 2020 ; Veuille, 2024). Les seules remarques que vous faites dans votre article sur le contenu du livre sont
1/ L’erreur de D. Milo sur l’origine du niveau de mortalité des girafons. Ok
2/ « il s’étonne de la médiocrité apparente des organismes vivants, sans comprendre correctement qu’elle résulte très souvent de compromis évolutifs » Vous êtes sérieux ? Vous n’avez visiblement pas lu le livre.
3/ « Il commet l’erreur, courante chez les non-spécialistes, de croire que ce sont les espèces, prises collectivement, qui sont en compétition les unes contre les autres (“les girafes” contre “les éléphants”), alors que la compétition s’opère au niveau des individus et même des gènes ». Sur ce point, D. Milo vous répond dans son post 1 des commentaires d’internautes de votre site. Je vous laisse vous y référer
Alors, rabattons-nous sur vos trois références. Qu’en est-il des trois critiques détaillées que vous citez ?
Pour Morris, désolé, je ne suis pas abonné à la « Quarterly Review of Biology », je passe mon tour.
Continuons avec M. Veuille. Coup de chance, je suis abonné à aoc.media, et j’avais donc pu lire son article dès sa sortie le 27 mai dernier…. Et j’avais immédiatement été très gêné par cet article : tout son texte porte uniquement sur la question de la girafe, qui fait l’objet d’un des chapitres introductifs du livre, mais ignorait totalement la thèse centrale du livre, qui n’était pas cité, et donc encore moins discutée (ce qui au moins n’est pas le cas de Radik).
Sérieusement ? Voilà un scientifique sérieux qui se permet de pondre un article dans une revue, de vulgarisation, certes, mais qui fait habituellement preuve d’une certaine exigence « déontologique », si je puis dire, et qui ne prend même pas la peine de lire le livre qu’il est censé critiquer ?
Finissons avec M. Radik : après efforts et transpiration, j’ai récupéré le texte en question, traduit grossièrement sur internet. Et donc, quels sont ses points de critique ?
Ils sont faibles !!!! Radik nous explique essentiellement que « (…) au 20e siècle, les biologistes professionnels sont allés encore plus loin (Comprendre : plus loin que les remarques de D. Milo) en supprimant des fondements de sa théorie ce que Darwin appelait la « lutte pour l’existence »(…) « La « théorie de l’assez bon » de Milo est donc moins radicale qu’il ne le prétend »
Mais…. Au risque de me répéter, je dois à nouveau (re)poser LA question fondamentale : avez-vous lu le livre de D. Milo ? Parce que l’ayant lu il y a peu (et je vous accorde n’être qu’un ignorant, je n’ai aucune formation scientifique. Je me définirai comme un « honnête citoyen » qui se contente de s’intéresser à la théorie de l’évolution depuis quelques décennies. Pour info, mon « chouchou », c’est Stephen Jay Gould…), il m’est apparu de façon plus qu’évidente que D. Milo faisait bien plus un travail d’historien des sciences que de scientifique (Information aux lecteurs : Daniel Milo est historien) Il cite d’ailleurs assez régulièrement un certain nombre de sources scientifiques du 20e siècle (dont mon chouchou et R. Lewontin). J’ai personnellement lu et compris ce livre pour ce qu’il me semble être de façon évidente : non pas une remise en cause de la théorie de l’évolution dans son ensemble, mais une analyse historique du point de départ de Darwin et de certaines erreurs (rectifiées depuis) issues notamment de la référence faite par Darwin au modèle de la sélection artificielle.
Et c’est tout..
Pas de quoi jouer les vierges outragées.
Pour la suite des arguments de Radik, il note que D. Milo qualifie son livre (à partir du moment où il développe autour de la question de la taille du cerveau humain et des fragilités que cela a introduit en termes de survie) de « philosophie naturelle » et en discute la pertinence, ce qui est légitime et même intéressant.
Mais justement, D. Milo n’affirme pas avoir « débunké » la théorie de l’évolution. Il avoue partir dans des considérations philosophiques qui relèvent de son champ de compétence, et qui ne « mettent pas en danger » la biologie et la théorie de l’évolution.
Ça justifiait vraiment que 150 scientifiques partent en croisade ?
« Information aux lecteurs : Daniel Milo est historien ».
C’est faux. N’importe qui pourra vérifier sur sa page wikipedia : Daniel Milo n’a aucune formation d’historien. Il a une maîtrise en philosophie et un doctorat en » études culturelles », dont le titre était « Aspects de la survie culturelle « , ce qui lui permet d’être Maître de conférence (MCF) en philosophie naturelle à l’EHESS. Donc pas beaucoup d’histoire à l’horizon !
Pour celles et ceux intéressé-es par le contenu du livre de M Milo, il y a une recension en accès libre par Guillaume Lecointre
https://www.afis.org/La-survie-des-mediocres
Bonjour,
Le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM), composé de journalistes, d’éditeurs et de représentants du public, a publié fin 2022 une recommandation qui pose les bonnes pratiques journalistiques en matière d’information scientifique . lire ici https://cdjm.org/le-traitement-des-questions-scientifiques/
Cordialement
Selon André, mon vrai crime est le sous-titre démagogique: “Critique du darwinisme et du capitalisme”
Comme vous avez tous lu le livre, vous connaissez déjà la raison d’être de ce sous-titre. Je la rappelle en bref :
Ladite naturalistic fallacy est omniprésente dans toutes les civilisations, la nôtre comprise. Tous nous croyons – a distinguer de savons – que la nature sait ce qu’elle fait, qu’elle a forcément raison. C’est pour cette raison que “naturel” est le plus grand compliment qu’on puisse donner à un homme, une attitude, une œuvre.
Ce qui nous ramène à la sélection naturelle – car c’est d’elle qu’on parle, et pas de la descendance par modification qui est vraie, point. Elle doit son succès dans le discours commun au fait qu’elle justifie bien des comportements qu’on peut rallier sous l’étiquette “capitalisme”. Je démontre dans le livre, pour la combattre, l’alliance objective, et si désastreuse pour l’humanité et la planète, entre le néolibéralisme et le néodarwinisme. Une critique du selectionnisme est de ce fait une critique du capitalisme. Voici la théorie in a nutshell.
Libre à vous d’y adhérer ou de la contester, mais vous n’avez pas le droit de la délégitimer !
Bonjour,
Non, votre « crime » est de parler mal d’un sujet que vous connaissez mal, pour en déduire des choses… qui vous appartiennent !
Votre délégitimation vient de là : on ne peut pas faire dire n’importe quoi à la science de l’évolution, et même à toute science en général.
Vous avez une formation philosophique, je vous citerai donc une phrase de Heidegger que vous devez connaitre, prononcée dans son Cours du semestre d’hiver 1951-1952 : « La science ne pense pas ». Je ne vais pas m’étendre sur sa signification réelle (que vous devez connaître) car parfois mal comprise, il s’en était expliqué d’ailleurs, mais en résumé : la science n’est pas prescriptive. Elle ne dit pas quoi faire. Elle ne juge pas.
C’est malheureusement ce que vous faites ici. Vous lui faite dire des choses qu’elle ne dit pas.
Bonjour,
La discussion initiale portant sur le rôle des médias dans la couverture du volume de Monsieur Milo, l’analyse du phénomène exige en fait un peu de sociologie des médias! En l’occurrence, les auteurs, biologistes, oublient la crédibilité des maisons d’édition comme facteur de réception. En français, le volume est paru chez Gallimard dans une collection généralement considérée comme « prestigieuse ». Plus important encore, cette publication suit en fait une parution en anglais aux Presses de l’université Harvard… Or, les presses universitaires soumettent toujours les textes à au moins deux évaluateurs externes (J’ai souvent évalué des manuscrits pour les presses américaines).
Donc il y a bien eu –en anglais– une « évaluation par les pairs ». Surtout que le volume relève bel et bien du domaine de la philosophie de la biologie, domaine qui requiert lui aussi une « expertise » qui n’est pas la même que l’expertise du biologiste…
Enfin les médias –même de vulgarisation scientifique — sont bien connus pour chercher la polémique. Combien de revues ont titré au cours des 30 dernières années « Et si Einstein s’était trompé? ». Un grand nombre comme vous pouvez facilement vérifier.
Donc pour parler des média sérieusement il faut aussi les bons outils pour les analyser au-delà du « sens commun »…
Bonjour,
Cette tribune est tout de même très gênante, et la vidéo de l’homme fabuleux aussi. 140 personnes contre 1, 140 qui demandent à ce qu’on les laisse travailler et faire la science alors qu’on ne leur a pas parlé directement, qui ne savent pas que c’est Marx lui-même qui a voulu créer un pont entre lui et Darwin, qui disent qu’ils ne fallait pas utiliser la forme qu’ils ont choisi mais qu’ils l’ont fait parce que faire bien était trop dur, qui refusent d’entendre les journalistes du Monde en disant que ces journalistes refusent de les entendre.
Je n’ai pas lu le livre de Milo mais au moins il a eu le courage d’écrire un livre avec son nim marqué dessus. Bravo à lui. Que le livre soit bon ou pas. Je suis sûr que je peux me débrouiller seul pour le juger ou mieux, si je n’y arrive pas, je vais aller lire par moi-même Darwin et Marx et ce qu’il me faut. Ces 140 prennent les gens pour des simples d’esprit. Mauvais services rendus à la science je pense.
On sent beaucoup de frustration chez eux et ce youtubeur. Il semble qu’ils ont voulu gratter un peu du buzz de Milo. Mieux aurait valu ne rien faire.
Bonjour Camille
Je vous rejoins pour le buzz, mais quel est l’intérêt de vos commentaires, alors que vous avouez vous même n’avoir pas lu le livre ?
Quel est le « courage » de faire le buzz avec des « idées » qui sont fausses ? Serai je courageux d’écrire un livre « on nous ment, la terre est plate » ?
Les scientifiques dont je fais partie ne prennent pas « les gens » pour les simples d’esprit. De quels « gens » parlez vous d’ailleurs ?
Je ne suis pas frustré, juste lassé par des commentaires qui n’apportent rien au débat. Quels arguments avez vous à apporter, à part votre avis personnel sur la question ? Quelle est l’importance de mon avis personnel par exemple sur la physique quantique ou la théorie de l’évolution ? Aucune me semble t il.
Nous ne parlons pas de forme ici, mais bien de contenu scientifique qui a abouti à un consensus, qui certes est sujet à évolution ou à discussion, mais pas de la manière présentée dans le livre.
Bonjour,
Cette tribune est belle et bien gênante car le scientifique que vous êtes ne la prend pas pour ce qu’elle est. L’initiateur a dit lui-même le contraire de ce que pour quoi vous la prenez. Elle ne veut pas parler ni du fond ni de la forme du livre de Milo mais donner une recette pro-science au journalistes. L’initiateur de la tribune a avoué lui-même qu’il n’a pas su écrire les bons mots.
Ceci dit, cette tribune a l’avantage de créer du discours. Vous êtes scientifique. J’en suis pas. Sur votre page perso, vous semblez présenter vos voyages à l’étranger comme un gage de savoirs. Moi je ne voyage pas. Par écologie. Par les temps qui courrent, je ne veux même pas donner aucun crédit au voyage, je ferai plutôt le contraire. Je ne vous blâme pas. Vous faites votre vie de scientifique. C’est juste pour dire que l’on accorde toujours une valeur aux choses. Et « accorder sa confiance épistémique à la théorie moderne de l’évolution » implique forcément quelque chose. Forcément. C’est là la plus grande gêne de cette tribune. Vous êtes scientifique et vous voyagez. Je suis dans la vraie vie (la catastrophe écolo) et je ne voyage surtout pas. Vous voyez le souci? La différence?
Je m’exprime mal. Si cela peut aider à me faire comprendre, j’avais lu un truc qui disait « le contraire de science sociale n’est pas pas de science sociale mais mauvaise science sociale ». Il y a toujours interprétation, toujours du social, de la vraie vie, toujours de la valeur sociale.
Pour résumer: Cette tribune se comprend mal, autant sur son fond (vous ne l’avez pas saisi) que sur sa forme (elle est moralisatrice tout en affirmant être amorale).
En fait, c’est justement le rôle de ces 140 scientifiques qui ont aussi un devoir de vulgarisation/diffusion/enseignement. Sachez que eux aussi passent leur temps à écrire en leur nom et à faire face à la critique.
En fait, en l’absence de base de connaissance vous lirez probablement cet ouvrage en prenant pour acquis ce qui est écrit dedans – nul ne cherche et ne peut tout vérifier en permanence – et c’est pourquoi vous tombez sur des articles (comme ce regard ou la presse) qui vous donnent des clefs de compréhension. Et en l’état, sans ces scientifiques, vous auriez lu Le Monde, et vous auriez donc ensuite lu ce livre plein de confiance et vous auriez diffusé son contenu à son entourage. Et donc là vous constatez que non, ni les livres, ni les articles journalistiques, ne peuvent être écrits à la légère, et que dans chaque domaine ceux qui s’y connaissent doivent réagir, pour soutenir, défendre ou condamner. Les études sociologiques montrent que les fausses informations se diffusent plus facilement que les vraies. (irez-vous vérifier mon assertion ? saurez-vous où chercher ?)
[…] « Ne rien faire », c’eut-été laisser faire.
Bonjour,
Non, le livre de Milo ne porte aucun danger. Arrêtez de vous auto-saisir.
On parle d’une tribune gênante et de vidéos pleines de suffisance ouvrant le robinet de la méchanceté. Dans le cas présent, ne rien faire aurait été bien faire. Les recensions suffisent.
Cher Monsieur Jean-Baptiste André,
Merci pour cet article. Il est stimulant. Je ne suis ni scientifique, ni journaliste, et il m’a posé beaucoup de questionnements. Je pense avoir mis le doigt sur son origine. Puis-je la partager ici? Pourriez-vous m’aider à passer ce cap (biais?) s’il vous plaît ?
Je répète, je ne suis pas scientifique, et pour moi les organismes vivants actuels sont simplement le produit d’autres êtres vivants. Alors quand vous écrivez que “Les organismes vivants actuels sont le produit d’un processus de changement graduel, l’évolution”, je comprends l’idée mais je commence déjà à me perdre. Je me demande est-ce que le vivant est à voir comme du non-vivant? Pour me raccrocher (mais peut-être je me trompe), je me dis alors que vous avez parlé par métaphore ou que cela n’est juste qu’une façon de s’exprimer prise dans un contexte de pensées bien précisées. Cependant ensuite, vous écrivez que “C’est donc la sélection naturelle qui explique que les organismes vivants soient adaptés à leur environnement”. Et là je me perds totalement. Pour moi non scientifique (vous m’excuserez si je dis une bourde idiote), les organismes vivants sont adaptés – contre – leur environnement. Un oiseau, s’il était adapté à son environnement, tomberait au sol. Un des premiers signes pour moi qu’un poisson est vivant et non mort est qu’il remonte contre son environnement. Vous voyez ce que je vois et ce que cela induit en moi?
Du coup, lire votre texte me donne l’impression que je devrais prendre les lois (ou forces je ne sais comment dire) qui traversent le réel que je vois pour plus réel que le réel lui-même. C’est ça mon questionnement… Vous pouvez me dire?
Bonjour,
Bien que d’accord pour l’essentiel avec ce Regard, j’ai (depuis juin) deux remarques ou objections, qui ne portent pas sur le sujet central du Regard -la promotion médiatique de livres de non experts, tel celui récent de D. Milo sur l’évolution-, mais sur la présentation des mécanismes de l’évolution par les cosignataires de ce « Regard-tribune ».
NB: Face à la virulence des commentaires et échanges sur ce forum, j’ai préféré attendre quelques mois et la fin des ‘hostilités’ (à propos de la médiatisation de livres de non experts) pour poster sur ce forum ces deux remarques ou objections, qui n’ont pas été prises en compte dans la version finale du texte par l’auteur principal (sous l’argument de ne pas compliquer la démonstration).
Ma première remarque est mineure, relativement au message global: parmi les principales forces ou mécanismes d’évolution génétique cités dans cette ‘tribune’ (mutation, dérive, sélection naturelle), il manque la migration ou ‘flux de gènes’, qui contribuent à l’évolution et à la structuration des populations à l’intérieur des espèces (métapopulations), ainsi qu’à la formation éventuelle de nouvelles espèces par isolement géographique (spéciation géographique).
Ma deuxième remarque ou objection me semble plus importante (et c’est d’ailleurs parce que cette remarque n’a pas été prise en compte que je n’ai pas cosigné le texte).
Je ne suis pas d’accord avec cette affirmation : « Les organismes vivants actuels sont le produit d’un processus de changement graduel, l’évolution, résultant de trois forces principales agissant sur la structure génétique des populations : la mutation, la dérive génétique et la sélection naturelle. […] C’est donc la sélection naturelle qui explique que les organismes vivants soient adaptés à leur environnement. »,
et ne suis donc pas d’accord avec la suite du paragraphe en question,
parce que cette focalisation exclusive sur les mécanismes génétiques de l’évolution fait l’impasse sur la variation non génétique des individus, en réponse à la diversité de leurs conditions de vie (dont de développement), qui affecte elle-même l’évolution des espèces.
Les organismes vivants ne sont pas que les « produits » de l’évolution génétique: leurs anatomie, physiologie et comportement ne sont pas la traduction univoque et rigide de leur bagage génétique (ou génome), codé dans l’ADN de leurs cellules, mais une ‘interprétation’ de ce génome qui peut largement différer d’un individu à l’autre, en fonction de la diversité des conditions de vie rencontrées depuis la conception (sous forme d’une première cellule) : environnement et interactions physicochimiques et biochimiques principalement pour les plantes, champignons et microorganismes, mais aussi interactions, expériences et apprentissages de tous types dont familiaux, sociaux et éventuellement culturels (ou ‘protoculturels’) chez les animaux, particulièrement chez les vertébrés sociaux. [Sans oublier les variations épigénétiques transmises avec le génome lors de la conception, cf. le Regard R25.]
Bien que sans base génétique, ces variations du ‘phénotype’ (anatomie, physiologie, comportement) des individus contribuent à leur adaptation et à l’évolution des populations..
.. Ainsi, même si la sélection naturelle est à la base du ‘potentiel adaptatif’ des individus, et notamment de l’ampleur de leur plasticité individuelle (dite ‘phénotypique’, voir le Regard R80a), via la structure et complexité de leur système nerveux par exemple, elle n’explique pas à elle seule l’adaptation des organismes à leur environnement : intervient aussi la diversité des interactions/expériences et apprentissages individuels, en particulier dans le cas des animaux sociaux.
Chez ces derniers, on peut souligner l’importance de la transmission culturelle (par observation et imitation) des techniques ou/et préférences alimentaires ou sexuelles, qui bien que sans base génétique contribue à l’adaptation des individus et à l’évolution des populations (voir par exemple les Regards R91 d’Etienne danchin et R75 d’Evelyne Heyer), notamment face à la transformation et l’anthropisation actuelle des habitats (voir par exemple les Regards R41, R48 et R80).
Ainsi, si l’évolution ne produit pas des organismes vivants “parfaits”, c’est en bonne partie parce qu’il n’y a pas de hasard des interactions parfait, ou de suite d’expériences parfaite, ou encore de culture parfaite! (.. dans des conditions de vie parfaites!)
Bonjour,
Cette tribune est décidément problématique. Même le journal qui l’a accueillie (après le refus du Monde) la torpille. Si ce que Anne T. suggère est juste, alors l’affirmation des 140 donnant les êtres vivants pour le produit de l’évolution pourrait être encore plus dangereux que le livre de Daniel Milo. Milo se dit humble, à comprendre dans l’erreur, quand ces 140 se sont érigés en juges et professeurs de vérité scientifique, tuant trop péremptoirement un débat qui semble stimulant.
Bonjour Camille,
Mes deux remarques sur ce ‘Regard’ postées avant-hier ne portaient pas sur la critique du livre de D. Milo, ni sur les recommandations aux journalistes, avec lesquelles je suis plutôt d’accord, mais sur la présentation des mécanismes de l’évolution et adaptation des organismes, en première partie de ce texte collectif.
(En tant que biologiste de l’évolution,) je ne peux que confirmer que les principales ‘forces’ ou mécanismes génétiques de l’évolution sont bien les trois cités par les auteurs, auxquels s’ajoute la migration..
Mais d’autres mécanismes sont en oeuvre pour expliquer la diversité des organismes au sein des espèces.. et leur évolution. L’adaptation des organismes à leur environnement ne s’appuie pas QUE sur leur bagage génétique (génome) mais aussi sur leur plasticité individuelle (dite phénotypique) en réponse à la diversité des interactions, écologiques au sens large (i.e. physicochimiques, biologiques, interspécifiques, sociales, culturelles..) rencontrées au cours de leur développement (puis de leur vie adulte).
La sélection naturelle et l’évolution génétique peuvent expliquer le ‘potentiel adaptatif’ des individus, mais pas la réalisation de ce potentiel – par l’usage de telle ou telle technique alimentaire par exemple, ou de tel trait culturel (qui peut même être non adaptatif!).
En bref, les organismes ne sont pas QUE des ‘produits’ de l’évolution génétique, parce qu’ils ne sont pas déterminés par leur seul génome. Ceci n’est pas un scoop(!) et a été souligné par bien des auteurs (dont R. Lewontin et S. Gould dans les années 1980, notamment).. mais devrait à mon avis être mentionné dans les textes de présentation de la théorie de l’évolution, même très synthétiques, sous peine de négliger par exemple l’importance de la transmission culturelle des préférences et techniques dans l’évolution des populations et espèces (+ l’importance des mécanismes épigénétiques).
Bonjour Anne T,
Oui, j’ai bien compris que vous confirmiez « que les principales ‘forces’ ou mécanismes génétiques de l’évolution sont bien les trois cités par les auteurs » mais que « d’autres mécanismes sont en oeuvre » quand même. Tout cela est très clair. Merci d’ailleurs d’avoir commenté cette phrase de la tribune.
SVP, pourriez-vous aussi discuter de la phrase « C’est donc la sélection naturelle qui explique que les organismes vivants soient adaptés à leur environnement”. Moi je vois vraiment très clairement que les êtres vivants ne sont justement pas adaptés à leur environnement mais contre leur environnement. Par exemple, une fois morts, ils subissent bien plus fortement que non-mort les ‘forces’ de leur environnement prouvant ainsi pour moi sans super grande éducation scientifique qu’ils vivaient contre leur environnement.
[J’ai bien sûr regardé les grands textes relatifs à l’adaptation pour répondre tout seul à ma question. Je trouve 50% d’occurrence « against » et 50% « at ». Ce flou scientifique m’interpelle beaucoup. À quoi tient-il ? Pourquoi cette dissonance entre ce que je vois et ce qui est scientifique ? J’en sais plus que la science ? Impossible. J’en sais moins ? Super scary. Je vivrais dans un monde alternatif. Dites-moi svp.]
Bonjour Camille,
Pour en savoir plus sur la sélection naturelle (et l’adaptation), vous pourriez lire par exemple l’article consacré à ce sujet sur wikipedia.
Pour vous répondre très rapidement sur l’adaptation ‘pour’ ou ‘contre’ l’environnement : dire que les organismes sont adaptés à leur environnement signifie notamment qu’ils possèdent des ‘traits de vie’, i.e. des caractéristiques morphologiques et comportementales, qui leur permettent de survivre et se reproduire (ou transmettre leurs gènes) dans cet environnement.
Faites quelques expériences de pensée seulement: par exemple, imaginez que vous sortiez une sardine de l’eau pour la poser sur le sol ou dans un arbre. Il est clair qu’elle sera incapable de respirer (faute de poumons par exemple) et de se déplacer, du fait de la gravité (‘force d’Archimède’ négligeable dans l’air) et de l’absence de pattes. Ses branchies, ses nageoires et sa forme hydrodynamique sont des adaptations au milieu marin où ses ancêtres ont évolué. [Adaptations forgées et maintenues au fil des générations par la sélection naturelle.]
[De même, les longs bras des gibbons seraient de peu d’utilité et même handicapants si l’espèce vivait en mer, ou dans des cavernes, ou dans la savane : associés à une activité arboricole diurne et une vision binoculaire performante, ces longs bras leur permettent de se déplacer rapidement par ‘brachiation’ en s’élançant de branche en branche : ce sont des adaptations à la vie arboricole diurne en forêt tropicale, héritées de leurs ancêtres depuis plusieurs millions d’années sous la pression de la sélection naturelle.]