[Stage M2 en écologie aquatique / écologie de la restauration]
Contexte du stage
Les petits plans d’eau d’origine artificielle sont issus de diverses activités humaines. Par exemple, les gravières sont des milieux aquatiques créés par les activités d’extractions de granulats et autres matériaux alluvionnaires alors que les étangs, qui ont souvent une origine anthropique plus ancienne, ont été creusés et aménagés pour des activités de production piscicoles. Largement anthropisés, ces milieux sont souvent peu biogènes (berges abruptes, fonds homogènes liés aux travaux d’extraction et de creusement, forte eutrophisation). Ils représentent pourtant des écosystèmes potentiellement attractifs pour les espèces inféodées aux petits plans d’eau, dont les représentants naturels sont de moins en moins nombreux. Ainsi, une fois l’exploitation terminée, il est possible d’aménager ces plans d’eau, par des travaux de reprofilage de berges, de recharge sédimentaire, de replantations. Ces aménagements ont pour ambition de rendre les milieux plus biogènes et de favoriser l’installation d’une biocénose diversifiée.
Depuis quelques années, portée notamment par les politiques européennes (Directive cadre sur l’eau, Directive Habitat, Règlement européen pour la restauration de la nature…) [1], une volonté de restaurer ou d’améliorer la qualité des milieux aquatiques a émergé, menant à la mise en œuvre d’actions très diverses. Certaines d’entre elles visent spécifiquement l’amélioration des habitats, mais leurs effets réels sur les milieux restent mal connus car les actions mises en œuvre demeurent mal recensées et peu suivies.
Afin de pallier ce manque de connaissances, le Pôle R&D ECLA « Ecosystèmes Lacustres » a initié en 2019 un réseau national de sites de démonstrations pour la restauration hydromorphologique en plans d’eau (SDD). Ce réseau vise à harmoniser les suivis de travaux de restauration et de diversification des habitats en plans d’eau et propose une méthode standardisée de suivi, applicable sur l’ensemble du territoire métropolitain, selon des principes Before-After Control-Impact (BACI) et sur plusieurs années (https://professionnels.ofb.fr/fr/node/635). L’objectif est d’évaluer l’efficacité des actions mises en œuvre en étudiant les trajectoires d’évolution des systèmes restaurés. Un guide opérationnel, présentant la méthodologie et les protocoles associés, a été publié en 2019 [2]. Ce guide est une première proposition et a vocation à s’enrichir des retours d’expériences pour améliorer la qualité du suivi proposé et sa capacité à mesurer l’atteinte des objectifs de restauration [3].
L’un des fondements du réseau SDD est de préconiser la mise en œuvre de protocoles standardisés, reproductibles et présentant un coût acceptable, permettant d’être mis en œuvre par toute structure en ayant la compétence. C’est pourquoi les protocoles proposés s’appuient largement sur ceux utilisés dans le cadre de la surveillance DCE. Par exemple, concernant les suivis des communautés benthiques et macrophytiques, il s’agit d’adaptations des protocoles IBML (Indice Biologique Macrophytique Lacustre) d’après la Norme Française T90-328 [4] et IML (Indice Macroinvertébrés Lacustres) par Dedieu et Verneaux [5]. Cette volonté forte quant à la mise en œuvre de protocoles standardisés pose toutefois quelques questions. En particulier, il s’agit de savoir si les données issues de ces protocoles de collecte sont suffisamment pertinentes pour répondre aux objectifs du suivi de la restauration. De plus, les masses d’eau suivies dans le cadre de la surveillance DCE sont des plans d’eau d’au moins 50 hectares. Les protocoles développés dans ce cadre ont été construits en incluant ce critère de taille, et leur adaptation à des plans d’eau de petite taille doit être investiguée.
Indépendamment de ce projet, le laboratoire LIVE (UMR7362) mène depuis plusieurs années des expérimentations sur une zone humide restaurée par la Collectivité Européenne d’Alsace, sur le site du Woerr (67). Ces expérimentations visent la restauration ou la recréation de petits milieux lentiques, et portent un intérêt particulier à la limitation du développement des espèces exotiques sur ces nouveaux milieux. Pour suivre les évolutions des mesures mises en œuvre, le laboratoire a choisi d’appliquer la méthode BECOME [6], développée spécifiquement pour la surveillance de l’état des petits plans d’eau par le bureau d’études Aquabio. Le laboratoire entretient des liens forts avec les gestionnaires de milieux aquatiques en Alsace, et d’autres sites pourraient faire l’objet de suivis prochainement.
Cette convergence dans les thématiques de recherche donne lieu à une collaboration entre les deux laboratoires depuis 2023. Dans ce cadre, deux stages ont été menés en 2024 [7] et 2025 dans le but de comparer ces deux protocoles de suivi : le protocole développé par le Pôle ECLA et le protocole BECOME, sur quatre sites d’étude : la gravière du Woerr (Lauterbourg, 67), les gravières de Portet-sur-Garonne (31), les étangs Nérac (Altenach, 68) et le site des Iles du Rhône (Montélimar, 26).
Les résultats obtenus ont mis en évidence une complémentarité notable entre les données recueillies selon les deux protocoles et les analyses qu’ils permettent d’effectuer. Cependant, considéré individuellement, chaque protocole possède des éléments essentiels et d’autres moins utiles dans le cadre du suivi de la restauration. Ainsi, ils peuvent atteindre leurs limites face aux objectifs poursuivis.
Aussi, le stage réalisé en 2025 a permis d’identifier plusieurs axes d’amélioration substantiels et d’engager une réflexion sur l’élaboration d’un protocole mieux adapté aux contraintes des milieux étudiés et aux objectifs à atteindre. Pour l’année 2026, la démarche s’inscrit dans la continuité de ces travaux, avec pour objectif de tester et d’évaluer ce protocole hybride sur l’un des sites déjà investigué, à savoir les Étangs Nérac à Altenach (68), et de pouvoir proposer des améliorations facilitant sa mise en œuvre par les opérateurs.
Objectifs :
Après une analyse bibliographique préalable et l’analyse de certains échantillons prélevés et non traités lors de la dernière campagne de terrain en 2025, les objectifs de ce stage sont de :
1. Rédiger un protocole expérimental consolidé de suivi des communautés macrophytiques et macro-invertébrées pour l’évaluation des effets des opérations de restauration en petits plans d’eau en s’appuyant sur les travaux des stagiaires précédents ;
2. Mettre en œuvre ce protocole sur un site déjà suivi, avec l’équipe encadrante, depuis la phase terrain jusqu’à la saisie et l’analyse des données, en passant par la détermination ;
3. Quantifier précisément les éléments de coûts et de mise en œuvre pour ce nouveau protocole ;
4. Analyser les résultats issus de ce stage et du précédent afin de mieux comprendre les effets de la restauration des petits plans d’eau sur les communautés étudiées et l’apport méthodologique de ce nouveau protocole ;
5. Apporter un éclairage sur l’opérationnalité et la transférabilité à plus large échelle du protocole testé.
Travail demandé
– Analyse bibliographique sur la thématique de la restauration des petits plans d’eau et sur la mise en œuvre de protocoles de suivis pour l’évaluation (un équilibre entre littérature grise et articles scientifiques devra être respecté) ;
– Tri et détermination de certains échantillons macroinvertébrés 2025 non traités (le ou la stagiaire bénéficiera d’une formation spécifique) ;
– Développement d’un protocole expérimental à partir des résultats issus des premiers travaux ;
– Mise en œuvre du protocole développé sur un site test (Etangs Nérac) : réalisation de relevés floristiques et faunistiques sur la zone d’étude ;
– Traitement des échantillons en laboratoire ;
– Retour détaillé et quantifié sur la mise en œuvre du protocole ;
– Analyse des résultats sur les effets de la restauration ;
– Rédaction d’un rapport d’étude.
Profil recherché
– Formation Master 2 en écologie avec de préférence une spécialité milieux aquatique et/ou restauration des écosystèmes ;
– Connaissances générales sur le fonctionnement des écosystèmes d’eau douce ;
– Expérience en détermination des macrophytes, ou à défaut des communautés végétales terrestres ;
– Connaissance des macroinvertébrés benthiques ; une expérience dans le tri/la détermination serait un plus ;
– Intérêt pour le travail de terrain et de laboratoire ;
– Maitrise des outils informatiques, de bureautique (pack Office) ;
– Compétences en analyse de données et SIG, notamment via les logiciels R et QGIS ;
– Capacité à appréhender un projet de recherche scientifique ; une expérience précédente lors d’un stage, d’un projet tutoré ou une forte motivation pour ce domaine, est demandée ;
– Dynamisme, enthousiasme, curiosité, rigueur, patience et sérieux ;
– Aptitude au travail de terrain, de laboratoire et en équipe tout en ayant un esprit d’initiative et un minimum d’autonomie ;
– Le stage impliquant des déplacements sur plusieurs sites expérimentaux et laboratoires en France, une forte adaptabilité est demandée ;
– Permis B demandé.
Conditions
Durée : 6 mois
Date de démarrage souhaitée : entre février et mars 2026
Date limite de candidature : Les candidatures seront étudiées au fil de l’eau.
Gratification de stage : selon la règlementation en vigueur.
Lieu : Le ou la stagiaire sera accueilli.e dans les locaux de l’INRAE d’Aix-en-Provence, et la convention de stage sera établie entre le stagiaire et INRAE Aix-En-Provence.
Des déplacements ponctuels sur plusieurs jours sont à prévoir, notamment dans la région Grand Est. Les frais relatifs à ces missions (hébergements, repas) seront pris en charge par INRAE.
Conditions particulières : Le ou la stagiaire pourra être amené.e à travailler en lien avec un.e stagiaire de niveau L3, qui l’appuiera pour certaines missions, notamment le tri des échantillons macroinvertébrés.
Contact, candidature : Pour plus d’informations ou pour soumettre votre candidature (lettre de motivation + CV), merci de contacter :
– Marlène Rolan-Meynard, marlene.rolan-meynard@ofb.gouv.fr
– Isabelle Combroux, combroux@unistra.fr
– Corinne Grac, corinne.grac@engees.unistra.fr
– Althaea Pangaud, althaea-elisabeth.pangaud@inrae.fr
Références
[1] Regulation (EU) 2024/1991 of the European Parliament and of the Council of 24 June 2024 on nature restoration and amending Regulation (EU) 2022/869 (Text with EEA relevance). 2024. Consulté le: 17 octobre 2025. [En ligne]. Disponible sur: http://data.europa.eu/eli/reg/2024/1991/oj/eng
[2] M. Taubaty, M. Rolan-Meynard, C. Argillier, J. C. Raymond, C. Marchand, et S. Westrelin, « Guide et protocoles pour le suivi d’actions de restauration hydromorphologique du littoral en plans d’eau. Rapport intermédidaire. », report, irstea, 2019. Disponible sur: https://hal.inrae.fr/hal-02608713
[3] C. Garron et al., « Towards the development of a standardized method to monitor lakeshore hydromorphological restoration measures », Aquatic Conservation: Marine and Freshwater Ecosystems, vol. 34, no 4, p. e4152, 2024, doi: 10.1002/aqc.4152.
[4] « NF T90-328 », Afnor EDITIONS. Disponible sur: https://www.boutique.afnor.org/fr-fr/norme/nf-t90328/echantillonnage-des-communautes-de-macrophytes-en-plans-deau/fa196320/322862
[5] « Guide Technique – Indice Macroinvertébrés Lacustres (IML) – Notice d’application et de calcul – Avril 2022 – Méthodes », https://www.sandre.eaufrance.fr/. Disponible sur: https://id.eaufrance.fr/met/1497
[6] F. Labat et P. Usseglio-Polatera, « A new bioassessment multimetric index (BECOME) and diagnostic tool (BECOMEd) for small standing waters », Ecological Indicators, vol. 154, p. 110831, oct. 2023, doi: 10.1016/j.ecolind.2023.110831.
[7] S. Lafont, « Mise en œuvre de suivis de la faune benthique et de la flore aquatique pour le suivi de la restauration en petits plans d’eau – Intercomparaison de méthodes », other, ENGEES, 2024. Disponible sur: https://hal.inrae.fr/hal-04979806
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