Contexte
Les corégones (Coregonus spp., famille des salmonidae, appelés féras dans le lac d’Annecy) sont des poissons inféodés aux eaux froides et qui sont distribués dans l’hémisphère Nord. Ils se retrouvent principalement en eaux douces mais certaines populations sont majoritairement marines ne remontant les fleuves que pour pondre. Ce groupe taxonomique présente une forte diversité (en termes d’espèces et au sein des espèces) et constitue une ressource majeure pour la pêche professionnelle et amateur dans les grands lacs péri-alpins. Les corégones sont par ailleurs très sensibles au changement climatique et aux facteurs de forçage locaux (pollution, espèces invasives, pêche…). Dans les lacs peri-alpins, ils se situent en limite sud de leur aire de répartition.
Dans le lac d’Annecy, le corégone est l’espèce de poissons la plus capturée et est ciblée à la fois par les pêcheurs professionnels et amateurs. La pêche est règlementée et des avis scientifiques sont émis sur la base d’indicateurs basiques couramment utilisés en eaux douces (Lorenzen et al., 2016). Ces indicateurs sont présentés dans un rapport scientifique puis exposés lors de réunions mais les acteurs de la pêche souhaitent une approche basée sur des indicateurs avec des valeurs de références afin d’observer des tendances claires et simplifiées.
En parallèle du suivi halieutique traditionnel, un travail de thèse est en cours visant à obtenir des outils d’aide à la décision plus performants, en s’appuyant sur des modèles de dynamiques de populations utilisés en milieu marin, adaptés pour les eaux douces et le corégone. Les travaux réalisés dans le cadre de ce projet vont permettre notamment de définir le rendement maximum durable (RMD), un concept théorique largement utilisé dans la science et la gestion des pêches. Malgré les nombreuses vertus de cet indicateur et son rôle dans la restauration populations de poissons en mer, des approches plus globales comme celle définie par Gascuel (2023), la pêchécologie, proposent l’utilisation d’indicateurs multiples prenant en compte différentes dimensions : écologiques, sociales et économiques. Ces approches sont d’autant plus importantes car les poissons pêchés jouent un rôle majeur dans l’écosystème et les fluctuations d’abondances par effet « top down » peuvent influencer sur la qualité de l’eau et donc des services comme l’approvisionnement en eau potable.
La diffusion des connaissances scientifiques et techniques vers les gestionnaires, les acteurs et les citoyens est une étape cruciale pour aider à la prise de décisions et permettre une gestion respectueuse des écosystèmes et des espèces qui y vivent. L’objectif de ce travail sera donc de préciser les indicateurs à prendre en compte afin d’améliorer les approches utilisées pour la gestion de la pêche du corégone du lac d’Annecy. Pour cela un tableau de bord d’indicateurs halieutiques, écologiques voire soci-économiques sera défini afin d’informer les gestionnaires et les acteurs de la pêche sur l’état de l’écosystème (habitat du poisson, ressources trophiques, conditions environnementales…), du stock et de son exploitation, dans le but de préciser des valeurs de référence et d’identifier les tendances. Il servira ainsi à alerter ou non sur l’état de la ressource.

Présentation du stage

Sur le modèle de ce qui est fait sur les populations de poissons migrateurs, une fois les indicateurs sélectionnés, complétés et adaptés, une première ébauche de tableau de bord sera établie afin d’apporter plus de lisibilité sur l’état de la population pour les gestionnaires et les acteurs de la pêche. Ce stage se situe donc à l’interface entre la recherche et la gestion pour faciliter le transfert de connaissances vers les gestionnaires et les acteurs de la pêche.
Les différentes missions de ce travail de stage seront :
– Faire un état de l’art concernant les indicateurs existants sur les populations de poissons, avec un focus sur les poissons d’eau douce et les milieux lacustres ;
– Echanger avec les structures utilisant ce type d’approche et vérifier la possibilité d’adaptation sur les populations de poissons lacustres ;
– Participer à des réunions en présence des gestionnaires et pêcheurs afin de préciser leurs besoins ;
– Sélectionner les indicateurs les plus adaptés, faire des adaptations éventuelles et les calculer ;
– Proposer un support de type tableau de bord où ces indicateurs seront présents ainsi que leurs évolutions, avec une lisibilité accessible à des non spécialistes.
Dans le cadre de ce stage l’étudiant.e s’appuiera sur des données halieutiques (effort de pêche, captures, données individuelles de croissance…) et des données environnementales acquises dans le cadre de l’Observatoire des LAcs (observatoire OLA, https://www6.inrae.fr/soere-ola ). L’étudiant sera amené à mettre à jour des indicateurs et en calculer de nouveaux sur la base de ressources bibliographiques.
L’environnement de travail est composé d’ichtyologues et limnologues ayant une bonne connaissance du fonctionnement des écosystèmes lacustres et de la dynamique de populations exploitées.

Structure d’accueil : UMR CARRTEL (INRAE/USMB)
CARRTEL : Centre Alpin de Recherches sur les Réseaux Trophiques et Ecosystèmes Limniques. Il s’agit d’une unité de recherches (https://www6.lyon-grenoble.inrae.fr/carrtel) regroupant des chercheur.e.s appartenant à INRAE et à l’Université Savoie Mont-Blanc. Elle héberge l’Observatoire des LAcs OLA (https://www6.inrae.fr/soere-ola) qui met au centre de ses recherches l’étude du fonctionnement et de l’évolution des systèmes lacustres en relation avec leurs bassins versants. Les travaux sont notamment conduits dans une perspective d’aide à la décision en matière de gestion des ressources naturelles que sont les grands lacs et avec la volonté de se placer au cœur des grands débats scientifiques actuels : appréciation de la diversité, rôle fonctionnel de la biodiversité, impact des changements globaux sur les écosystèmes. Ces travaux incluent des suivis à long terme qui constituent une base de données environnementale précieuse pour comprendre les effets de l’anthropisation et des changements climatiques.

Durée : 4 à 5 mois

A pourvoir le ou à partir du : 2 avril 2024

Lieu de stage : Thonon-les-Bains, 75bis avenue de Corzent

Encadrant/co-encadrant : Chloé Goulon (ingénieure d’étude, encadrante principale) et Jean Guillard (co-encadrant, ingénieur de recherche)

Profil recherché : Etudiant.e de M1 provenant d’un master en écologie, écologie des milieux aquatiques, sciences de la mer ou halieutique. L’étudiant.e devra avoir des connaissances de bases et un intérêt pour la programmation sur R. Connaissances souhaitées en dynamique des populations et en écologie. Des connaissances en écologie des milieux aquatiques seraient un plus. Intérêt pour le travail avec des acteurs multiples et le transfert de connaissances.

Modalités pour candidater : envoyer CV + lettre de motivation à chloe.goulon@inrae.fr avant le 26 février

Informations : possibilité de logement gratuit sur le site de INRAE

Contact : si vous avez des questions, n’hésitez pas à contacter chloe.goulon@inrae.fr

Rémunération : gratification règlementaire

Bibliographie
Lorenzen, K., Cowx, I. G., Entsua-Mensah, R. E. M., Lester, N. P., Koehn, J. D., Randall, R. G., … & Bower, S. D. (2016). Stock assessment in inland fisheries: a foundation for sustainable use and conservation. Reviews in Fish Biology and Fisheries, 26(3), 405-440.

Gascuel, D. (2023). La pêchécologie: Manifeste pour une pêche vraiment durable. Editions Quae, 95 p.

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: chloe.goulon@inrae.fr

Pour toute autre question, vous pouvez contacter sfecodiff@sfecologie.org.