Description succincte du raisonnement et des hypothèses testées

Hypothèses testées :
L’ajonc d’Europe (Ulex europaeus) est une espèce arbustive présente dans 60% des parcelles forestières du massif des Landes de Gascogne, et abondante dans 18% d’entre elles (Inventaire Forestier National ; source IGN). C’est une légumineuse qui joue un rôle important pour le cycle de l’azote dans cette forêt cultivée1. Cependant, c’est une espèce aussi caractérisée par l’accumulation de tissus à faible teneurs en eau et fortement inflammables au cours de son développement2. Son abondance dans les sous-bois forestiers peut fournir un combustible important pouvant augmenter les dégâts liés au feu en cas d’incendie (Aléa Incendie) 3. C’est donc une espèce d’une importance cruciale par rapport au risque d’incendie dans la région. Par ailleurs, les teneurs en eau des différents organes des ajoncs (mais aussi du reste de la végétation : pin et autres espèces du sous-bois) diminuent fortement en cas de vagues de chaleurs et de sécheresse (Aléa Sécheresse), vagues de plus en plus fréquentes avec le changement climatique, ce qui devrait accentuer encore plus fortement les dégâts en cas d’incendie. Enfin, des études dans d’autres contextes ont montré la forte dynamique des ajoncs suite au passage d’un incendie, via une germination accrue après le choc thermique lié au passage du feu4, sauf si celui est très intense provoquant une destruction très importante de la banque de graines.
L’ensemble des éléments précités ont été évalués dans des études dédiées, avec une approche monocritère. Cependant, le contexte actuel, en particulier l’occurrence possible et de plus en plus fréquente de différents aléas agissant en interaction (Incendie × Sécheresse) requière la prise en compte conjointe de ces différents aléas et des facteurs de vulnérabilités associés (aléa Feu, aléa Sécheresse, gestion du sous-bois et itinéraires sylvicoles, caractéristiques écologiques des espèces concernées) pour une évaluation multirisque pertinente. Cette démarche étant très complexe expérimentalement, une démarche de modélisation peut apporter une solution complémentaire pour évaluer simultanément l’ensemble de ces éléments. A travers une démarche de modélisation centrée sur la dynamique de population de l’ajonc d’Europe et la production de biomasse correspondante en sous-bois de parcelle forestière cultivée, les hypothèses suivantes seront testées :
1) Les choix et itinéraires sylvicoles à l’échelle de la parcelle ayant pour conséquence un forte abondance d’ajonc d’Europe et de manière prolongée au cours de la révolution (via un contrôle mécanique du sous-bois réduit, via une densité de peuplement d’arbre favorisant une forte entrée de lumière dans le sous-bois) devrait aboutir à des dégâts plus importants lors d’un aléa Feu.
2) L’augmentation de l’intensité de l’aléa Sécheresse devrait agir en interaction forte avec l’aléa Feu et aboutir à des dégâts plus importants à l’échelle du peuplement forestier, pour partie liée à la présence du combustible ajonc fin et très sec en sous-bois.
3) La dynamique des ajoncs au sein du peuplement serait favorisée par le passage d’un incendie de faible à moyenne intensité, ce qui pourrait créer une rétroaction augmentant la vulnérabilité future des peuplements forestiers face aux incendies.

Etapes de travail envisagées :

En poursuivant le travail de modélisation de la dynamique de l’ajonc d’Europe (modèle WOUDYFOR5 – Woody Understory DYnamic in FORestry) à l’échelle de la parcelle forestière, le travail proposé ici priorise les étapes suivantes :

1) Estimer les quantités de biomasses d’ajoncs présentes dans le sous-bois au cours du temps dans les parcelles forestières selon leur dynamique naturelle (croissance et mortalité) et leur gestion, de façon à comparer l’incidence des principaux itinéraires techniques en cours dans la région. Ce travail nécessite une prise en compte de la croissance de peuplements de Pin maritime dans différents contextes stationnels dans la région et soumis à différentes sylvicultures, ce qui est rendu possible via le travail croisé avec le modèle dédié Pinuspinaster6 (Collaboration avec Céline Meredieu, UMR BIOGECO)

2) Estimer l’augmentation des dégâts provoqués sur le peuplement lors d’un aléa incendie par cette biomasse d’ajonc en sous-bois via des modèles prédictifs de propagation du feu déjà existants (collaboration avec INRAE-URFM Avignon, modèle Firetech). L’intensité des incendies en périodes plus ou moins sèches (selon la saison, selon l’occurrence de sécheresses exceptionnelles) sera aussi analysée en prenant en compte les variations de teneurs en eau correspondantes dans les différentes biomasses combustibles. Cette tache nécessite aussi donc un travail de terrain pour caractériser la variation des teneurs en eau des différents compartiments de végétation dans les parcelles forestières, et en particulier en période de sécheresse.

Ces deux premières étapes ont pour objectif d’évaluer à court terme la vulnérabilité aux incendies liée à la présence de légumineuses en sous-bois en :
– décrivant l’influence des choix des forestiers sur la vulnérabilité du peuplement forestier, à travers la dynamique de colonisation plus ou moins forte de l’ajonc d’Europe se traduisant par des biomasses de combustibles variables.
– étudiant l’effet de l’ajonc d’Europe sur les dégâts dans les parcelles forestières, et dans des conditions de sécheresse plus ou moins marquées.

3) Estimer la dynamique de population de l’ajonc d’Europe post-incendie pour évaluer dans quelles conditions la régénération initiale de l’espèce serait favorisée. Cette dernière étape pourra se baser sur des suivis des populations d’ajonc d’Europe dans les parcelles impactées par les incendies récents de 2022- (jeunes plants, banques de graines). Une approche à plus long terme, basée sur la connaissance des incendies plus anciens dans la région peut aussi être envisagée. Les résultats empiriques de cette dernière tâche pourront éventuellement être intégrée à la démarche de modélisation développée dans les étapes 1 et 2.

Ces différentes étapes permettront de donner une perspective à plus long terme quant au risque d’incendie dans la région, avec des recommandations de gestion du sous-bois pour la réduction du risque incendie selon les enjeux.

Références :
1. Vidal, D. F. et al. Intercropping N-fixing shrubs in pine plantation forestry as an ecologically sustainable management option. Forest Ecology and Management 437, 175–187 (2019).
2. Hely, C. & Forgeard, F. Heterogeneity of a high Ulex europaeus health with respect to relation to fire propagation (Brittany, France). Canadian Journal Of Botany-Revue Canadienne De Botanique 76, 804–817 (1998).
3. Anderson, S. A. J. & Anderson, W. R. Ignition and fire spread thresholds in gorse (Ulex europaeus). International Journal of Wildland Fire 19, 589–598 (2010).
4. Hanley, M. E. Thermal shock and germination in North-West European Genisteae: implications for heathland management and invasive weed control using fire. Applied Vegetation Science 12, 385–390 (2009).
5. Delerue, F. Dynamique de population d’une légumineuse du sous-bois de la forêt landaise (Ulex europaeus) dans le cadre de la sylviculture du pin maritime : proposition d’un modèle conceptuel. (Thèse Université de Bordeaux, 2013).
6. Serrano-León, H et.al. From genetic gain to economic gain: simulated growth and financial performance of genetically improved Pinus sylvestris and Pinus pinaster planted stands in France, Finland and Sweden. Forestry: An International Journal of Forest Research 94, (512–525)

Principales compétences attendues ou à développer :
– Ecologie végétale
– Dynamique de population
– Ecologie du feu
– Programmation : maitrise ou capacité à apprendre un langage informatique
– Analyses statistiques
– Communication écrite et orale

Établissement d’accueil :
Nom du laboratoire d’accueil : UMR 5805 EPOC. Collaboration forte avec l’UMR 1391 ISPA.

Nom des tuteur.trice.s :
Florian DELERUE (UMR EPOC) – fdelerue@bordeaux-inp.fr
Laurent AUGUSTO (HDR – UMR ISPA) – laugusto@inrae.fr
Maya GONZALEZ (HDR – UMR ISPA) – maya.gonzalez@agro-bordeaux.fr

Financement de la thèse de doctorat:
50% Bordeaux –INP : Acquis
50% Région Nouvelle Aquitaine (dans le cadre d’un programme scientifique sur les multirisques en Forêt). Décision attendue prochainement. La thèse pourra démarrer en Septembre 2024 sous réserve du financement par la région Nouvelle Aquitaine.

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: fdelerue@bordeaux-inp.fr

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