Contexte :
Les insectes ravageurs sont la cible de nombreux traitements insecticides nocifs pour la santé humaine et pour la biodiversité, notamment en verger de pommiers (Etienne et al. 2023). Une alternative à l’emploi des insecticides réside dans l’établissement de pratiques agricoles favorables à la régulation des ravageurs par leurs ennemis naturels (lutte biologique par conservation). Parmi ces pratiques, la diversification des couverts végétaux est particulièrement prometteuse (Tibi et al. 2023). D’une part, les ressources florales fournis par la végétation spontanée ou des bandes fleuries spécialement implantées permettent de complémenter le régime alimentaire des ennemis naturels (pollen, nectar, proies alternatives), mais peuvent également détourner les fourmis des ravageurs hémiptères (pucerons, cochenilles) qui entretiennent des relations mutualistes avec elles et qui, en échange de miellat, repoussent, perturbent ou tuent les ennemis naturels de ces ravageurs (Anjos et al. 2022). L’objet de cette thèse est de décrire et quantifier l’influence de la fourniture de ressources florales sur la composition des communautés d’arthropodes observés en verger de pommiers et sur les interactions écologiques entre ravageurs, ennemis naturels, fourmis et espèces végétales. L’ensemble des interactions trophiques seront révélées par des techniques moléculaires de détection de l’ADN des proies animale et ressources végétales consommées par les ennemis naturels. Ces analyses permettront de fournir des outils de quantification de l’impact de la disponibilité des ressources florales (spontanée ou implantée) pour les ennemis naturels et les fourmis sur le niveau attendu de contrôle biologique des insectes ravageurs en verger de pommiers.

Déroulé de la thèse :

Partie 1. Impact des ressources florales sur les composition et abondance des communautés d’arthropodes prédateurs et des fourmis en vergers de pommiers.
La première partie portera sur l’analyse de la communauté de prédateurs spécialistes et généralistes, ainsi que des espèces de fourmis, présents dans les arbres en fonction de la diversité floristique gérée ou spontanée. Pour cela, le(a) doctorant(e) pourra mobiliser des données de suivi de communauté de prédateurs naturels en verger de pommiers déjà disponibles au laboratoire et en cours de collecte dans le cadre du projet Diver’Ant, incluant des suivis dans le bassin rennais auxquels le doctorant contribuera. L’analyse des résultats permettra d’évaluer comment la présence de ressources florales fait varier la présence et l’abondance des prédateurs et des fourmis.

Partie 2. Description et analyse fines des réseaux écologiques impliquant les prédateurs en verger de pommier.
La deuxième partie portera sur l’analyse des relations trophiques entre arthropodes prédateurs et insectes ravageurs et espèces florales par détection moléculaire (PCR diagnostique et barcoding). Les échantillons de prédateurs (incluant araignées, coccinelles, forficules, syrphes et punaises) proviendront des vergers suivis dans le cadre du projet Diver’Ant. Les prédateurs seront capturés vivants et leur ADN sera extrait au laboratoire pour détecter la présence des ADNs résiduels de proies et de végétaux dans leur tractus digestif, selon deux approches complémentaires. Les PCRs diagnostiques permettront de mesurer la fréquence de détection de quelques ravageurs ciblés en verger de pommier (par exemple les pucerons et les carpocapses), alors que le séquençage de barcodes permettra d’identifier l’ensemble du spectre de proies et de ressources florales consommées par les ennemis naturels. L’analyse des résultats permettra d’évaluer comment la présence de fourmis et la disponibilité en ressources florales fait varier la fréquence de consommation des ravageurs ciblés chez les auxiliaires spécialistes (e.g. coccinelles) et la gamme de proies exploitées par les espèces généralistes (e.g. araignées, forficules) et plus globalement la structuration des réseaux écologiques.

Partie 3. Modélisation du biocontrôle en verger de pommier.
Une troisième partie s’attachera à modéliser l’effet des ennemis naturels sur les populations de ravageurs, c’est-à-dire le biocontrôle, et à explorer comment la présence des fourmis module ce biocontrôle. Pour cela, des données de suivi de dynamique des populations et d’abondance de ravageurs, fourmis et ennemis naturels ainsi que les fréquences de prédation détectées par analyse moléculaire seront mobilisées pour ajuster un modèle permettant de quantifier l’impact des ennemis naturels sur la dynamique des populations de ravageurs en fonction de la présence de fourmis. Ce modèle permettra d’explorer comment une modification du réseau d’interactions autour du ravageur agit sur l’évolution de ses abondances. En pratique, nous ferons l’hypothèse que le taux d’accroissement des populations du ravageur dépend de l’action des ennemis naturels (proportionnelle à leur abondance et voracité) déterminée par l’abondance et la composition des communautés d’auxiliaires mais également par leur intensité de prédation modulée par la présence des fourmis. L’influence de la disponibilité en ressources florales sur les abondances et comportements des ennemis naturels et des fourmis sera également considérée comme un levier potentiel de modulation du biocontrôle. Les données mobilisées seront des données déjà disponibles portant sur les dynamiques du puceron Dysaphis plantaginea en verger cidricole (thèse Laurence Albert) et issues de nouvelles collectes dans des vergers de pommiers dans lesquels des stratégies de réduction des abondances de fourmis seront déployées (projet Diver’Ant). Des comparaisons pourront être réalisées avec des observations de même type portant sur des suivis d’auxiliaires et ravageurs en vergers de clémentinier (projet IRIS).

Contexte de travail :
Le doctorant sera accueilli dans les locaux de l’UMR IGEPP à Rennes. Il bénéficiera d’un financement acquis sur le projet EcoControl (Astrid Cruaud, INRAE, UMR CBGP, Montpellier) et collaborera étroitement avec les participants du projet Diver’Ant (Bruno Jaloux, Institut Agro IGEPP, Angers ; Pierre Franck, INRAE, PSH, Avignon). Des séjours à Avignon et Montpellier sont prévus. Les suivis et captures dans les vergers de pommiers seront réalisés en collaboration avec PSH Avignon et IGEPP Angers. Les frais de fonctionnement et d’analyse moléculaire proviendront des projets EcoControl et Diver’Ant.

Encadrement :
Direction de thèse : Manuel Plantegenest, PR Institut Agro Rennes, 50%
Manuel.Plantegenest@agrocampus-ouest.fr
Co-encadrante 1 : Elsa Canard, CR INRAE Rennes, 30%
Elsa.Canard@inrae.fr
Co-encadrant 2 : Pierre Franck, CR INRAE Avignon, 20%
Pierre.Franck@inrae.fr

Profil recherché :
Titulaire d’un master en écologie avec un intérêt pour le domaine agricole et l’entomologie. Des compétences en analyse des données, modélisation et/ou bioinformatique seront appréciées.

Rémunération :
Réglementaire (2 200 euros brut par mois)

Candidature :
Envoi d’un CV et d’une lettre de motivation aux 3 contacts (Manuel.Plantegenest@agrocampus-ouest.fr; elsa.canard@inrae.fr; pierre.franck@inrae.fr). Fournir le nom et les coordonnées d’une ou deux personnes référentes, éventuellement une lettre de recommandation. Candidature au plus tard le 4 septembre.

Bibliographie :
Albert, L., 2017. Régulation Naturelle du Puceron Cendré et Aménagement Agro-écologique: l’Exemple des Vergers Cidricole du Nord-Ouest de la France (phD). Agrocampus Ouest, Rennes,
Albert, L., Franck, P., Gilles, Y., Plantegenest, M., 2017. Impact of agroecological infrastructures on the dynamics of Dysaphis plantaginea Passerini (Hemiptera: Aphididae) and its natural enemies in apple orchards in northwestern France. Environemental Entomology 46, 528–537. https://doi.org/10.1093/ee/nvx054
Anjos, D.V., Tena, A., Viana-Junior, A.B., Carvalho, R.L., Torezan-Silingardi, H., Del-Claro, K., Perfecto, I., 2022. The effects of ants on pest control: a meta-analysis. Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences 289, 20221316. https://doi.org/10.1098/rspb.2022.1316
Etienne, L., Rusch, A., Lavigne, C., Fouillet, E., Delière, L., Franck, P., 2023. Less field-level insecticides, but not fungicides, in small perennial crop fields and landscapes with woodlands and organic farming. Agricultural Systems 204, 103553. https://doi.org/10.1016/j.agsy.2022.103553
Tibi, A., Martinet, V., Vialatte, A., Alignier, A., Angeon, V., Bedoussac, L., Bohan, D., Bougherara, D., Cordeau, S., Courtois, P., Deguine, J.-P., Enjalbert, J., Fabre, F., Fréville, H., Grateau, R., Grimonprez, B., Gross, N., Hannachi, M., Launay, M., Lelievre, V., Lemariè, S., Martel, G., Navarrete, M., Plantegenest, M., Ravigné, V., Rusch, A., Suffert, F., Thoyer, S., 2022. Protéger les cultures en augmentant la diversité végétale des espaces agricoles. Rapport scientifique de l’Expertise scientifique collective. INRAE. 86 pages. https://doi.org/10.17180/awsn-rf06

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: elsa.canard@inrae.fr

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