CONTEXTE SCIENTIFIQUE :
Les crossing-overs méiotiques entre chromosomes homologues sont essentiels au cycle sexué des eucaryotes, car ils assurent une ségrégation chromosomique correcte et génèrent de la diversité génétique via la recombinaison. La distribution des crossing-overs le long des chromosomes, connue sous le nom de paysage de recombinaison, varie considérablement entre les espèces, mais aussi au sein d’une même espèce (Johnston 2024). Les forces évolutives qui façonnent cette diversité restent mal comprises, en partie à cause de limitations expérimentales. Pourtant, comprendre les causes de l’évolution des paysages de recombinaison pourrait éclairer les avantages évolutifs de la recombinaison et, plus largement, de la reproduction sexuée.

Des études d’évolution expérimentale menées sur plusieurs organismes ont montré que la recombinaison peut accélérer l’adaptation, probablement en brisant les déséquilibres de liaison négatifs et en augmentant la variance génétique (Parée et Teotónio 2025). Cependant, ces études comparent généralement des populations avec et sans recombinaison, plutôt que d’examiner l’évolution des paysages de recombinaison eux-mêmes.

OBJECTIFS :
rec-1 est un gène impliqué dans la redistribution des crossing-overs méiotiques chez le nématode C. elegans (Parée et al. 2024). La perte de fonction de rec-1 déplace les crossing-overs vers les centres chromosomiques, augmentant ainsi les taux de recombinaison dans ces régions par rapport au type sauvage, et modifiant les paysages de recombinaison de C. elegans. Nous avons précédemment montré que, bien que rec-1 modifie les taux de recombinaison sur l’ensemble du génome, la sélection indirecte agissant sur rec-1 dépend principalement des associations génétiques qu’il établit avec les loci sélectionnés voisins. Ces associations persistent sur davantage de générations que celles avec des loci plus éloignés.
Ces résultats soulèvent naturellement la question suivante : comment la sélection sur l’allèle rec-1 dépend-elle de sa localisation génomique ? En outre, comme beaucoup d’espèces, en particulier les plantes à fleurs, les hermaphrodites de C. elegans peuvent s’autoféconder. La théorie suggère qu’une augmentation du taux d’autofécondation entraîne un plus grand déséquilibre de liaison à l’échelle du génome, ce qui pourrait inverser la direction de la sélection sur rec-1 (Stetsenko, R. et Roze 2022). L’effet de la localisation génomique de rec-1 devient-il moins important à mesure que le taux d’autofécondation augmente ? Ce projet vise à répondre à ces deux questions.

MÉTHODOLOGIES :
Le projet utilise des populations expérimentales de C. elegans présentant une diversité génétique naturelle, adaptées aux conditions de laboratoire et génétiquement modifiées au niveau du gène rec-1 pour exhiber des paysages de recombinaison distincts (Parée et al. 2025). L’étudiant·e mènera des expériences de compétition directe sur plusieurs générations afin d’estimer les coefficients de sélection entre les allèles rec-1 de type sauvage et perte de fonction, introduits à différentes positions génomiques. L’étudiant·e manipulera également le taux d’autofécondation au cours de l’évolution expérimentale. Des échantillons d’ADN groupés seront collectés à plusieurs moments, et les génotypes rec-1 seront quantifiés par un test qPCR. Les coefficients de sélection seront estimés à l’aide de modèles linéaires mixtes généralisés sous R, puis validés par des simulations numériques également réalisées sous R.

L’étudiant·e devra s’intéresser à la recherche empirique (y compris à la culture expérimentale d’organismes modèles et aux méthodes de biologie moléculaire) et être familier·ère avec l’environnement de programmation R ou Python.

Le/La stagiaire retenu·e pourra débuter dès janvier 2026 pour une durée maximale de 6 mois. Sous réserve d’une évaluation positive, le stage pourra être suivi d’un projet de thèse de doctorat, pour lequel un financement de 3 ans est assuré par l’ANR.

CONTACT:
Envoyez une lettre de motivation, un CV succinct et les coordonnées de deux référent·e·s, réunis dans un seul fichier PDF, à l’adresse teotonio@bio.ens.psl.eu. Les demandes d’informations informelles sont les bienvenues.

REFERENCES:
Johnston, S. E. 2024. Understanding the Genetic Basis of Variation in Meiotic Recombination: Past, Present, and Future. Molecular biology and evolution 41. DOI: 10.1093/molbev/msae112.
Parée, T. and H. Teotónio. 2025. Experimental tests on the evolution of sex and recombination and their adaptive significance. Journal Evolutionary Biology. DOI: 10.32942/X2Z03F.
Parée, T., L. Noble, D. Roze, and H. Teotónio. 2025. Selection can favor a recombination landscape that limits polygenic adaptation. Molecular biology and evolution 42. DOI: 10.1093/molbev/msae273.
Parée, T., L. Noble, J. Ferreira Goncalves, and H. Teotónio. 2024. rec-1 loss of function increases recombination in the central gene clusters at the expense of autosomal pairing centers. Genetics 226. DOI: 10.1093/genetics/iyad205
Stetsenko, R. and D. Roze. 2022. The evolution of recombination in self-fertilizing organisms. Genetics 222. DOI: 10.1093/genetics/iyac114.

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: teotonio@bio.ens.psl.eu

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