CONTEXTE :
Protéger les cultures en minimisant le recours aux produits phytopharmaceutiques nécessite le déploiement de solutions alternatives, préventives ou curatives. Ces méthodes sont communément réfléchies et évaluées de façon indépendante les unes des autres, alors même que plusieurs sont parfois déployées dans un même itinéraire technique. Il est donc indispensable d’identifier les leviers susceptibles d’être combinés et de comprendre comment ils interagissent. De plus les réflexions sont principalement conduites à l’échelle de la parcelle et ne prennent pas en compte la possibilité de mosaïques spatiales et temporelles de leviers alors qu’il est très probable que l’effet de leviers locaux (enherbement, biocontrôle…) sur les bioagresseurs va largement dépendre de la mosaïque des leviers dans le paysage qui affectent les dynamiques paysagères des ravageurs et auxiliaires. L’étude de l’effet de la distribution spatiale des pratiques est très récente et concerne principalement la surface en agriculture biologique dont l’augmentation à l’échelle des paysages est généralement favorable à la biodiversité et la régulation des ravageurs. Des interactions sont en effet observées entre pratiques locales et structures des paysages (p. ex. agriculture biologique x pratiques intensives dans le paysage sur la biodiversité : Smith et al. 2020).
L’équipe Contrôle Biologique par Conservation (CBC, UR PSH, INRAE Avignon) réalise des relevés écologiques dans un réseau de vergers de pommiers et poiriers sur le site atelier Basse Vallée de la Durance (BVD, https://site-atelier-basse-vallee-durance.fr/). Ce territoire de 500 km² au sud d’Avignon est inclus dans l’un des principaux bassins de production de pommes en France. Des suivis de biodiversité et des enquêtes sociotechniques y sont menés dans 30 à 50 vergers commerciaux depuis 2006. Ces données spatialisées permettent d’appréhender les déterminants des relations entre les abondances et la diversité des bioagresseurs (principalement des insectes phytophages – pucerons et lépidoptères), celles des auxiliaires (arthropodes, oiseaux), et l’efficacité du contrôle des ravageurs par les auxiliaires. Dans le cadre du projet CACOLAC, notre objectif est d’analyser les données écologiques en fonction des pratiques agricoles dans le paysage. Nous avons commencé à nous intéresser à ces questions (Petit, et al., 2020, Lefebvre et al. 2016), en mettant notamment l’accent sur les filets de protection contre le carpocapse (Bouvier et al., 2022, Poinas et al., soumis) et souhaitons maintenant aller au-delà de l’étude de pratiques individuelles en tenant compte des combinaisons de pratiques à l’échelle du paysage. Nous cherchons en particulier à analyser les stratégies de phytoprotection des producteurs et comprendre l’impact de leur organisation spatiale et temporelle sur les bioagresseurs et auxiliaires (e.g. Etienne et al., 2023; Monteiro et al., 2013). Des données sur les pratiques agronomiques et les caractéristiques du verger, telles que la présence de filets de protection, le mode de conduite (biologique ou conventionnel), le type d’irrigation, la variété et l’âge du verger, sont déjà disponibles dans plus de 2000 parcelles, ainsi que les calendriers de traitement pour 150 de ces parcelles.

OBJECTIFS : L’objectif du présent stage sera de comprendre si la prise en compte des pratiques à l’échelle du paysage permet de mieux expliquer les données écologiques récoltées à l’échelle des parcelles. Un focus sera mis sur les pratiques en termes de calendriers de traitements phytosanitaires (y compris biocontrôle). Les différentes étapes seront : i) cartographier une partie des vergers pour lesquels nous disposons de données agronomiques dans le site atelier Basse Vallée de la Durance, ii) estimer notre capacité à prédire la pression phytosanitaire (indice de fréquence de traitement, IFT) à partir d’autres données agronomiques via un algorithme de random forest et iii) évaluer l’influence de la pression phytosanitaire à l’échelle du paysage sur les populations de ravageurs et d’auxiliaires.

DEROULEMENT DU STAGE : Une première partie du stage sera dédiée à compléter la numérisation et la cartographie des pratiques des agriculteurs en vergers de pommiers sous Qgis à partir de cartes papier et d’informations agronomiques. Des échanges avec des associations de producteurs (GRCETA et CETA de Cavaillon, partenaires du projet CACOLAC) seront possibles si besoin. Les informations intégrées dans un SIG offriront une visualisation précise de la distribution spatiale des pratiques agronomiques sur près de 2000 vergers et des traitements phytosanitaires pour un nombre plus restreint de vergers à l’échelle de la BVD.
La seconde partie du stage sera consacrée à l’analyse de données à l’aide du logiciel R. Des analyses antérieures ont permis d’identifier les facteurs locaux et paysagers qui influencent l’intensité d’usage des pesticides Ces travaux ont mis en évidence des liens entre IFT et combinaisons d’autres pratiques, servant ainsi de base pour prédire les IFT des 2000 vergers de la BVD pour lesquels nous disposons de données agronomiques. D’autres analyses viseront à comprendre l’impact de ces combinaisons de pratiques et de la pression phytosanitaire paysagère sur les populations d’arthropodes (ravageurs et auxiliaires).

ENCADREMENT : Le stage sera co-encadré par Isis Poinas, Claire Lavigne et Bertrand Gauffre (INRAE unité PSH, équipe CBC).

PROFIL RECHERCHE : Nous recherchons un(e) candidat(e) en Master 2 en écologie ou école d’agronomie ayant des connaissances en agronomie et, si possible, en écologie du paysage. La maitrise des analyses statistiques avec R studio et des compétences en géomatique (logiciel QGIS) seront fortement appréciées.

CONDITIONS : Stage de 6 mois, idéalement à partir de Janvier/Mars 2025 (dates flexibles). Le/la stagiaire bénéficiera de la gratification standard (environ 560 € par mois).

LIEU DU STAGE : UR 1115 PSH (Plantes et Systèmes de culture Horticoles) –INRAE Avignon

CONTACT: isis.poinas@inrae.fr

Références sur le sujet :
Bouvier JC, Boivin T, Lavigne C. (2022) Single-row exclusion nets: an alternative pest control method with no detectable impact on breeding bird assemblages in orchards bordered by hedgerows. Agronomy for Sustainable Development 42, 23. https://doi.org/10.1007/s13593-021-00743
Etienne, L., Rusch, A., Lavigne, C., Fouillet, E., Delière, L., & Franck, P. (2023). Less field-level insecticides, but not fungicides, in small perennial crop fields and landscapes with woodlands and organic farming. Agricultural Systems, 204, 103553. https://doi.org/10.1016/j.agsy.2022.103553
Larsen, A. E., Noack, F., & Powers, L. C. (2024). Spillover effects of organic agriculture on pesticide use on nearby fields. Science, 383(6689), eadf2572. https://doi.org/10.1126/science.adf2572
Lefebvre, M., Franck, P., Toubon, J. F., Bouvier, J. C., & Lavigne, C. (2016). The impact of landscape composition on the occurrence of a canopy dwelling spider depends on orchard management. Agriculture, Ecosystems and Environment, 215, 20–29. doi:10.1016/j.agee.2015.09.003
Monteiro, L. B., Lavigne, C., Ricci, B., Franck, P., Toubon, J.-F., & Sauphanor, B. (2013). Predation of codling moth eggs is affected by pest management practices at orchard and landscape levels. Agriculture, Ecosystems & Environment, 166, 86–93. https://doi.org/10.1016/j.agee.2011.10.012
Petit S., Muneret L., Carbonne B., Hannachi M., Ricci B., Rusch A., Lavigne C. (2020) Landscape-scale expansion of agroecology to enhance natural pest control: a systematic review. Advances in ecological research. 63, 1-48.
Poinas I. et al. soumis. Landscape-scale exclusion netting increases target and non-target pests in unnetted apple orchards.
Smith OM, Cohen AL, Reganold JP, Jones MS, Orpet RJ, Taylor JM, Thurman JH, Cornell KA, Olsson RL, Ge Y, Kennedy CM, Crowder DW. (2020) Landscape context affects the sustainability of organic farming systems. Proc Natl Acad Sci USA. 117, 2870-2878.

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