Contexte scientifique
L’aquaponie est un système hors-sol de production alimentaire basé sur les technologies existantes d’hydroponie et d’aquaculture pour co-cultiver en circuit d’eau fermé des poissons (de consommation ou d’ornement) et des plantes (légumes, herbes aromatiques, plantes potagères) (Lopchan Lama et al., 2025). Il est constitué de 3 compartiments en interaction : un bac pour la culture végétale en hydroponie, un compartiment d’élevage de poissons, et une unité de filtration biologique (biofiltre). Son principe de fonctionnement se base sur une seule entrée d’éléments dans le système via la nourriture pour les poissons. Leurs déjections seront transformées par les communautés microbiennes du biofiltre, et en particulier, l’ammoniaque (qui devient toxique pour les poissons à forte concentration) sera transformé en nitrates par les bactéries nitrifiantes (Changey et al., 2025). Ces nitrates permettront d’apporter de l’azote minéral nécessaire à la croissance végétale. Si les aspects fondamentaux de la culture en aquaponie sont assez bien documentés, l’enjeu majeur réside actuellement dans l’optimisation du fonctionnement de ce système tripartite afin d’obtenir systèmes de production durables avec des rendements satisfaisants et une réelle rentabilité économique.
Un autre aspect de ce système de culture est le potentiel de communication chimique (allélopathie) entre les différentes entités biologiques (plantes, poissons, microorganismes) (Senff et al., 2022). Les racines des plantes libèrent des composés chimiques variés dont l’ensemble constitue les rhizodépôts. Les rhizodépôts contiennent une majorité de molécules organiques riches en carbone (mucilages, sucres solubles, acides organiques) et en azote (acides aminés, protéines), agissant comme substrats nutritifs stimulant la croissance bactérienne et animale. Ils contiennent aussi des molécules issues du métabolisme secondaire (alcaloïdes, terpénoïdes) qui peuvent avoir des effets sur la croissance des organismes et le bien-être animal. Toutefois, l’effet de chaque biomolécule peut être modulé par sa concentration et la présence d’autres molécules dans le « cocktail » libéré par les plantes. La composition qualitative et quantitative des rhizodépôts varie selon les espèces/variétés considérées, leurs caractéristiques intrinsèques (phénologie, âge, fitness) et extrinsèques (environnement (lumière, température, substrat), variabilité spatiale et temporelle) (Badri et Vivanco, 2009 ; McLaughlin et al., 2023). Les performances des systèmes aquaponiques pourraient être optimisées avec la culture d’espèces végétales particulières, ou avec un mélange d’espèces végétales. Il manque toutefois, à l’heure actuelle, de documentation sur la composition des exsudats des végétaux cultivés en aquaponie et leurs effets sur les poissons et les microorganismes.
La laitue (Lactuca sativa, famille des astéracées) et le basilic (Ocimum basilicum L., famille des lamiacées) font partie des plantes les plus cultivées en aquaponie et répandues dans les systèmes aquaponiques commerciaux (Verma et al., 2023). En effet, les légumes à feuilles sont favorisés en aquaponie du fait de leur bon développement en milieu concentré en nitrates, de leur courte période de croissance, du fait qu’ils ne requièrent pas de grandes demandes pour les autres nutriments et qu’ils sont souvent très demandés à la production (Bailey and Ferrarezi, 2017). De plus, les lamiacées sont connues pour leur production d’huiles essentielles et leur métabolisme secondaire développé (Jakovljević et al., 2022).

Le projet de recherche collaboratif MéVéA (Influence d’un Mélange d’espèces Végétales sur les performances du système de culture en Aquaponie ; collaboration entre le Laboratoire Animal et Agrosystèmes – L2A et l’UMR Silva) vise à étudier le fonctionnement du système (rendement, qualité et santé des plantes et des poissons, qualité de l’eau, biomolécules) en culture aquaponique de 3 associations plantes-poissons :
i) Perche (Perca fluviatilis) x laitue (Lactuca sativa L.)
ii) Perche (Perca fluviatilis) x basilic (Ocimum basilicum L.)
iii) Perche (Perca fluviatilis) x laitue (Lactuca sativa L.) et basilic (Ocimum basilicum L.)
Le projet s’articule en 2 sous-objectifs :
1. Caractériser les exsudats racinaires des 2 espèces végétales (nature et quantité) dans les 3 associations
2. Étudier le rendement et la qualité des produits (plantes, poissons) dans les 3 associations
Il est attendu que la nature et la quantité des composés libérés, ainsi que les rendements et la qualité des produits différeront entre la laitue et le basilic cultivés en pur d’une part, et entre les plantes de la même espèce cultivées en pur ou en mélange d’autre part.

Objectifs du stage et manipulations prévues
Le dispositif de culture aquaponique est installé dans une serre thermorégulée (site de l’ IUT Nancy-Brabois, Villers-lès-Nancy, rattaché à la plateforme expérimentale en aquaculture – PEA ; 15 min à pied du laboratoire situé à la Faculté des Sciences et Technologies). Le dispositif est constitué de 6 pilotes d’aquaponie. Chaque pilote est constitué de 3 compartiments en système couplé : (i) un bac en résine pour le compartiment hydroponique avec radeau flottant en polystyrène (ii) un bac en verre pour le compartiment aquacole, (iii) un bac en verre contenant 6 mousses en polyuréthane expansé, servant simultanément de filtre physique et biofiltre. Chacun des pilotes compte 12 plantes et 400g de perches. L’expérience durera 6 semaines (45 jours). Les 12 pilotes seront répartis en 3 traitements, soit 4 réplicats par traitement.
Le travail de l’étudiant.e recruté.e en stage s’insèrera dans le projet de recherche MéVéA. L’étudiant.e aura en charge le suivi de la croissance et de la santé des plantes, ainsi que les mesures prévues sur les plantes à l’issue de l’expérimentation. Dans le détail, des mesures de croissance aérienne (nombre de feuilles, longueur des feuilles, biomasses finales) et d’indicateurs de la santé de la plante (pigments foliaires : chlorophylles, flavonols, anthocyanes, index azote/flavonols et échanges gazeux) seront réalisées à plusieurs reprises lors de l’expérimentation (a minima au début, à mi-temps et à la fin de la culture). Les plantes seront prélevées à la fin des 6 semaines, séparées en feuilles et racines. Avant les prélèvements finaux, les exsudats racinaires des plantes des 2 espèces seront récupérés en vue de les caractériser. Une analyse chimique élémentaire (teneurs en C et en N, nitrates micro et macroéléments), ainsi qu’un criblage métabolomique (métabolites secondaires, vitamines, molécules de signalisation de stress dans les feuilles (hormones de stress, antioxydants) sont envisagés pour les 3 compartiments (feuilles, racines, exsudats).

* Rémunération brute mensuelle : 629 euros
* Le lieu de stage est facilement accessible en transports en commun : https://fst.univ-lorraine.fr/campus-et-services/transport-et-directions/

Profil du candidat
Niveau master 2 en physiologie végétale, sciences de l’environnement, ou écologie fonctionnelle
Intérêt pour l’expérimentation en serre et en laboratoire.
Intérêt pour l’analyse de données et le traitement statistique (utilisation de R).
Qualités rédactionnelles
Autonomie et bon relationnel lui permettant une intégration facile dans l’équipe

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: dorine.desalme@univ-lorraine.fr

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