1. Contexte
La perte et la fragmentation des habitats naturels représentent une menace majeure pour la biodiversité à l’échelle mondiale [1]. S’il existe un consensus fort sur le fait que conserver la biodiversité nécessite de préserver une grande quantité d’habitats naturels (i.e. réduire, voire stopper la diminution des surfaces d’habitat) [2], l’arrangement optimal de ces habitats dans l’espace est l’objet d’un débat intense depuis les années 1970 [3,4]. Plus précisément, pour une certaine quantité d’habitats dans un paysage, est-ce qu’il existe des configurations spatiales qui sont réellement plus favorables que d’autres au maintien de la biodiversité ? Ce débat est extrêmement vivant dans la littérature actuelle avec deux communautés scientifiques qui s’opposent : ceux qui défendent le fait que gérer la configuration spatiale des habitats est essentiel pour la conservation versus ceux qui affirment que gérer la configuration n’a que peu d’intérêt et que la conservation passe en premier lieu par une préservation et une restauration des habitats naturels. Les deux phénomènes, perte et fragmentation des habitats, ne sont pas indépendants : quand la quantité d’habitat diminue dans un paysage, les « morceaux » d’habitat restants deviennent plus petits et plus espacés les uns des autres, ce qui rend la résolution du débat ardue [5]. Etant donnée la pression foncière forte qui s’exerce aujourd’hui sur les écosystèmes, les opportunités pour maintenir ou restaurer des habitats en grande quantité sont restreintes. Aménager les territoires pour optimiser la configuration spatiale des habitats apparait dans ce contexte comme la seule option pour conserver la biodiversité [6]. Résoudre ce débat sur la fragmentation des habitats est donc devenu une priorité.
2. Objectifs
Le projet SCALED, financé par le fond Européen pour la recherche (ERC), a pour objectif de s’attaquer à ce débat. Dans ce contexte, nous mettons en place une approche expérimentale in situ qui vise à caractériser la réponse des communautés, des populations et des individus d’arthropodes des prairies sèches de la plaine de la Crau à la quantité et l’organisation spatiale de leur habitat. Dans ce système, les prairies typiques sont couvertes à ~50% par de gros galets issus de l’ancien lit de la Durance ; galets qui permettent aux arthropodes de s’abriter des températures extrêmes et de leurs prédateurs [7]. De nombreuses zones de la plaine ont été dépierrées pour faire place à des activités agricoles, réduisant ainsi drastiquement l’abondance et la richesse des communautés des coléoptères [8]. Cependant, nous ne savons pas de quelle manière l’intensité du retrait des galets et l’organisation spatiale des galets restants peut atténuer ou non ces effets sur les arthropodes, et si la réponse des populations et communautés est liée à la capacité de mouvement des différents organismes.
Les objectifs de ce stage sont plus spécifiquement de participer à une expérimentation in
situ de suivi d’individus et de communautés dans des paysages expérimentaux (quantité et organisation spatiales de l’habitat différentes). L’étudiant participera à deux volets complémentaires :
1) suivi des communautés d’arthropodes avec la mise en œuvre de la collecte et l’analyse des données pour l’année 2025 et comparaison avec les années 2022-2024 ainsi qu’une analyse de données de biomasses capturées dans différents contextes paysagers en 2024 [9],
2) participation au suivi de mouvement des individus avec une approche novatrice qui permet un gain de résolution spatiale et temporelle [10].

L’étudiant.e sera donc amené.e à effectuer du piégeage sur le terrain (pièges barber, chasse à vue), ainsi que des analyses statistiques sous R.

1. IPBES. Global Assessment Report on Biodiversity and Ecosystem Services. (2019).
2. Fletcher Jr, R. J. et al. Is habitat fragmentation good for biodiversity? Biol. Conserv. 226, 9–15 (2018).
3. Fahrig, L. et al. Is habitat fragmentation bad for biodiversity? Biol. Conserv. 230, 179–186 (2019).
4. Diamond, J. M. The island dilemma: lessons of modern biogeographic studies for the design of natural reserves. Biol. Conserv. 7, 129–146 (1975).
5. Villard, M. & Metzger, J. P. Beyond the fragmentation debate: a conceptual model to predict when habitat configuration really matters. J. Appl. Ecol. 51, 309–318 (2014).
6. Albert, C. H., Rayfield, B., Dumitru, M. & Gonzalez, A. Applying network theory to prioritize multispecies habitat networks that are robust to climate and land‐use change. Conserv. Biol. 31, 1383–1396 (2017).
7. Buisson, E. & Dutoit, T. Creation of the Natural Reserve of la Crau: implications for the creation and management of protected areas. J. Environ. Manage. 80, 318–326 (2006).
8. Blight, O. et al. Using stone cover patches and grazing exclusion to restore ground-active beetle communities in a degraded pseudo-steppe. J. Insect Conserv. 15, 561–572 (2011).
9. Sohlström E.H. et al. Applying generalized allometric regressions to predict live body mass of tropical and temperate arthropods. Ecol. & Evol. (2018) DOI: 10.1002/ece3.4702
10. Blight, O. et al. Potential of RFID telemetry for monitoring ground-dwelling beetle movements: A Mediterranean dry grassland study. Frontiers in Ecol. & Evol. (2023) https://doi.org/10.3389/fevo.2023.1040931

Sujet ouvrant sur une thèse ? non

Compétences requises de l’étudiant :

– stage de césure, les dates de stage doivent couvrir mars, avril, mai, juin, juillet 2023
– Motivation vis à vis des questions d’écologie du paysage et écologie spatiale
– Motivation vis à vis des approches expérimentales et de terrain
– Manipulation d’organismes vivants
– Compétences naturalistes : entomologie
– Ecologie du mouvement
– Bonne connaissance de R
– Bon niveau en anglais
– Bonnes capacités de terrain
– Des compétences en modélisation seraient un plus

Programme(s) de recherche dans le cadre duquel/desquels ce stage est effectué :
Projet Européen ERC SCALED
Financement du stage et du stagiaire :
– Indemnités règlementaires : 4.35 euros/h

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: cecile.albert@imbe.fr

Pour toute autre question, vous pouvez contacter sfecodiff@sfecologie.org.