Résumé:
Ce sujet de thèse explore les stratégies écologiques des associations mycorhiziennes pour renforcer la résilience des écosystèmes locaux de la région Hauts-de-France face aux défis posés par le changement climatique. Les champignons mycorhiziens, en tant que symbiontes essentiels des plantes, jouent un rôle crucial à l’échelle mondiale dans l’adaptation des plantes a la sécheresse. Cependant, leur influence sur l’adaptation des écosystèmes locaux reste encore mal comprise. À travers une approche intégrée combinant suivi expérimental avancé, techniques moléculaires, et bio-informatique, cette recherche examinera comment les associations mycorhiziennes contribuent à l’adaptation rapide des plantes aux conditions environnementales locales fluctuantes. En utilisant des systèmes modernes de phénotypage numérique et d’Ecotron climatique, le projet analysera comment les traits phénotypiques et génétiques des champignons mycorhiziens s’alignent avec les changements dans les stratégies adaptatives CSR des plantes (Compétitrices, Tolérantes au Stress, Rudérales) sous des pressions de sélection climatique actuelles et futures. Les résultats incluront une compréhension approfondie des dynamiques adaptatives plante-champignon, le développement d’outils génétiques et phénotypiques pour l’évaluation des mycorhizes, ainsi que des contributions à des stratégies innovantes pour l’adaptation climatique fondées sur les écosystèmes. Ces avancées combleront des lacunes critiques dans les connaissances, tout en offrant des solutions pour une gestion durable des écosystèmes dans la région et en s’inscrivant dans des stratégies mondiales visant à atténuer les impacts du changement climatique.

Contexte scientifique:
Le changement climatique rapide ne constitue pas seulement une menace pour les écosystèmes et l’économie mondiale. Il posera également de grands défis aux écosystèmes régionaux, ainsi qu’aux secteurs économiques qui en dépendent, tels que la foresterie et l’agriculture dans un avenir proche, en raison de l’augmentation prévue des événements météorologiques extrêmes comme les sécheresses et les vagues de chaleur. Malgré l’importance reconnue de ces secteurs économiques, la plupart des recherches sur les écosystèmes se sont concentrées sur les réponses individuelles des plantes et des communautés qu’elles forment [1], avec, plus récemment, des approches holistiques incluant le microbiome des plantes. Les micro-organismes du microbiome des plantes peuvent avoir des effets majeurs sur la croissance, la résilience et la survie de leur hôte [2], et sont capables de modifier leur propre adaptation à un rythme relativement rapide [3], ce qui peut conduire à des scénarios où l’adaptation microbienne étend le potentiel évolutif de l’hôte pour s’adapter [4]. Parmi les composants clés du microbiome, les champignons mycorhiziens sont les symbiontes des plantes les plus répandus et les plus importants [5]. Ils jouent un rôle essentiel dans de nombreuses fonctions écosystémiques, notamment la séquestration du carbone dans les sols [6], et sont reconnus pour leur rôle de facilitateur clé dans l’accélération de l’adaptation des plantes à la sécheresse à l’échelle mondiale [7]. Cependant, le potentiel des mycorhizes à influencer l’adaptation locale des communautés végétales aux sécheresses et aux vagues de chaleur reste encore largement méconnu.
Les avancées scientifiques récentes ont mis en lumière la pertinence du cadre conceptuel des « stratégies adaptatives universelles » CSR pour modéliser l’adaptation des plantes aux changements environnementaux. Ce cadre met l’accent sur les traits phénotypiques clés qui permettent aux plantes de prospérer dans une large gamme de conditions environnementales fluctuantes [8]. Un avantage majeur de ce cadre est qu’il reflète des ensembles viables de traits impactant la fitness et la survie, offrant ainsi un lien évolutif entre l’écologie et la sélection naturelle [8]. Dans sa forme actuelle, ce cadre des stratégies adaptatives universelles prédit que les plantes développent des variations de traits fonctionnels qui s’alignent sur des combinaisons graduelles et intermédiaires de trois grandes stratégies écologiques mutuellement exclusives, à savoir :
• La stratégie de Compétiteur (C-selection) – survie principalement via l’investissement des ressources dans la croissance végétative pour faciliter et contrôler l’acquisition des ressources dans des environnements stables et productifs ;
• La stratégie de Tolérance au stress (S-selection) – survie principalement par la protection des activités métaboliques, la conservation des ressources et la réparation cellulaire dans des tissus denses et persistants exposés à des environnements contraignants, relativement variables, pauvres en ressources ou toxiques ;
• La stratégie Rudérale (R-selection) – survie principalement via une régénération rapide des populations confrontées à des perturbations létales répétées, en favorisant l’investissement des ressources dans la reproduction dans des environnements fréquemment instables.
Ces trois stratégies de survie ne peuvent pas évoluer simultanément et sont mutuellement exclusives en raison des compromis liés à l’allocation des ressources chez les plantes, offrant ainsi des indicateurs clés des régimes majeurs de sélection naturelle auxquels les plantes sont soumises dans différents biomes.
Ce cadre s’est révélé d’une grande applicabilité expérimentale sur les communautés végétales dans des études utilisant des gradients manipulés et naturels de pressions de sélection CSR [9] : la compétition entre plantes (C-sélection), le stress lié à la limitation des ressources (généralement les nutriments du sol, S-sélection), et les perturbations physiques (R-sélection). Ces études ont aidé à évaluer la divergence et la convergence des communautés végétales locales, l’occupation des niches fonctionnelles, la richesse spécifique et les réponses aux gradients environnementaux le long des successions primaires. Cependant, l’intégration des communautés de champignons mycorhiziens dans ce cadre est pratiquement inexistante, malgré leur rôle clé de facilitateur dans l’écologie et l’évolution des plantes [1, 4-6]. Notre analyse préliminaire (non publiée) a révélé que différents types de mycorhizes végétales (par exemple, mycorhizes arbusculaires, ectomycorhizes et autres types mycorhiziens) présentent des stratégies écologiques adaptatives CSR distinctes et sont donc mieux adaptées pour faire face à différents moteurs de sélection naturelle. Cependant, l’influence de ces stratégies adaptatives des associations mycorhiziennes dans la résilience des communautés végétales face aux conditions climatiques extrêmes fluctuantes reste inconnue.
Combler ces lacunes dans les connaissances est essentiel pour comprendre et prédire les impacts du changement climatique sur les écosystèmes locaux, lesquels sont directement liés à la stabilité socio-économique locale en raison de l’importance des secteurs forestier et agricole locaux. Par exemple, les écosystèmes fournissant des services cruciaux tels que la régulation de l’eau, la fertilité des sols, la séquestration du carbone, ainsi que la production alimentaire et de bois, pourraient être disproportionnellement affectés par la perturbation des processus adaptatifs régis par l’holobionte végétal. De plus, le manque de données empiriques sur le fonctionnement des composants clés de l’holobionte à l’échelle locale,

Objectifs:
L’objectif principal de ce sujet de thèse est d’examiner comment les champignons mycorhiziens et leurs plantes associées s’adaptent à des pressions de sélection en évolution rapide, en se concentrant sur les variations locales des traits fonctionnels, génétiques et phénotypiques. En intégrant des approches expérimentales et analytiques, cette étude vise à faire progresser notre compréhension de la symbiose plante-mycorhize face aux défis environnementaux futurs et à contribuer au développement d’un cadre prédictif pour l’adaptation des écosystèmes au changement climatique.
Objectif 1 : Identifier des traits génétiques et phénotypiques pouvant servir de marqueurs mycorhiziens pour une adaptation écologique rapide.
Cet objectif vise à découvrir des traits génétiques et phénotypiques spécifiques permettant aux champignons mycorhiziens et à leurs plantes hôtes de prospérer face à une forte incertitude des conditions environnementales. En utilisant des outils moléculaires avancés, tels que des ensembles d’outils génomiques complets, le séquençage de nouvelle génération et le phénotypage, cette étude identifiera des traits associés aux adaptations rapides en matière d’acquisition des ressources, de tolérance au stress et de résilience aux perturbations. Les connaissances acquises contribueront au développement de marqueurs prédictifs permettant d’évaluer la stabilité et la résilience futures des écosystèmes.
Objectif 2 : Caractériser la variation fonctionnelle locale au sein et entre différents types mycorhiziens de champignons et de plantes soumis à des changements rapides de sélection naturelle.
Cet objectif consistera à évaluer les écosystèmes locaux pour identifier comment les associations mycorhiziennes varient en termes de fonctionnalité selon différents gradients environnementaux. Une attention particulière sera accordée à la comparaison de différents types mycorhiziens, tels que les mycorhizes arbusculaires (AM), les ectomycorhizes (EcM), les mycorhizes éricoïdes (ErM), entre autres, en réponse à des stress tels que la compétition, la dégradation des sols, les perturbations, la sécheresse et les vagues de chaleur. Cette caractérisation servira de base à la compréhension des dynamiques écologiques adaptatives mises en oeuvre par les champignons mycorhiziens et leurs plantes associées à l’échelle locale.

Profil du candidat :
Nous recherchons un candidat hautement motivé, titulaire d’un Master en écologie, évolution, sciences des plantes, microbiologie, bioinformatique ou dans des domaines connexes. Le candidat idéal devrait avoir :
• Un diplôme de Master dans une discipline pertinente.
• Une expérience en biologie moléculaire, séquençage d’amplicons ou modélisation écologique (préférée mais non requise).
• De solides compétences analytiques et statistiques (une expérience en R/Python est un plus).
• Un intérêt pour le changement climatique et l’adaptation des écosystèmes.
• De bonnes compétences en communication en anglais (le français et le néerlandais sont un plus mais non requis).
• La volonté de travailler dans un environnement de recherche international et interdisciplinaire.

Détails du poste et avantages :
• Financement complet pour 3 à 4 ans dans le cadre d’une co-tutelle entre l’UPJV (France) et l’UHasselt (Belgique), avec la durée allouée entre les deux sites en fonction du programme de doctorat.
• Installations de recherche de pointe, y compris un Ecotron à température contrôlée et un phénotypage numérique à haut débit.
• Collaboration internationale en recherche avec mobilité entre la France et la Belgique, ainsi que des opportunités de visite de pays partenaires et de participation à des réunions scientifiques internationales.
• Salaire de doctorat avec avantages sociaux selon les régulations universitaires et nationales.
• Plusieurs opportunités de formation liées au programme de doctorat ainsi que des cours offerts par l’école doctorale.

Comment postuler :
La procédure de candidature se déroulera en deux phases. Tout d’abord, les candidats intéressés doivent soumettre les documents suivants avant le 18 avril 2025, à Prof. Dr. Marco Cosme (marco.cosme@u-picardie.fr ; les candidats sélectionnés pour un entretien seront contactés) :
• Une lettre de motivation détaillant les motivations et l’expérience pertinente.
• Un CV décrivant le parcours académique et l’expérience en recherche (y compris la liste des publications et la participation à des réunions scientifiques, si applicable).
• Les coordonnées de deux référents académiques.
• Des copies des relevés de notes et certificats académiques (y compris le classement des classes si disponible).

Dans la deuxième phase, les candidats sélectionnés seront invités à défendre leur candidature devant l’école doctorale, prévue pour mai 2025. Un seul candidat approuvé par l’école doctorale sera accepté pour le poste de doctorat. Le poste devrait débuter en septembre 2025.

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: marco.cosme@u-picardie.fr

Pour toute autre question, vous pouvez contacter sfecodiff@sfecologie.org.