En lien avec l’histoire complexe de l’espèce (proche de l’extinction au XIXe siècle, plusieurs goulets d’étranglement sévères, puis un retour sur l’ensemble de l’arc alpin grâce à de nombreux programmes de réintroduction), le bouquetin des Alpes présente une très faible diversité génétique et une connectivité faible entre les populations (Stüwe et Nievergelt 1991 ; Biebach et Keller 2010 ; Brambilla et al. 2020). De plus, l’aire de répartition de l’espèce n’a pas augmenté ces dernières années (Brambilla et al. 2020), soulevant des questions sur les facteurs qui influencent la connectivité entre les populations et limitent l’expansion de son aire de répartition.
Cependant, le bouquetin des Alpes est également l’un des derniers mammifères terrestres en Europe (hors Scandinavie) à effectuer des migrations, c’est-à-dire des mouvements sur de longues distances qui connectent réellement, ou peuvent potentiellement connecter des populations proches, améliorer la diversité génétique et permettre une expansion de l’aire de répartition. Dans ce contexte, maintenir ou promouvoir la connectivité migratoire est donc essentiel pour la conservation de l’espèce (et le bon fonctionnement des écosystèmes, voir par exemple Hirzel et al. 2004 et Bogliani et al. 2011 sur l’importance de la migration du bouquetin des Alpes pour le gypaète barbu).
Sur la base de plus de 330 trajectoires migratoires enregistrées par GPS dans 15 populations réparties sur l’ensemble de l’arc alpin, Chauveau et al. (2024) ont récemment proposé une méthode permettant de prédire la connectivité migratoire entre des domaines vitaux saisonniers connus (hiver et été) avec une confiance relativement élevée. En s’appuyant sur cette approche, l’objectif du stage est d’étudier les facteurs qui influencent la connectivité migratoire au sein et entre les populations, ainsi que l’expansion ou la limitation de l’aire de répartition connu des différentes populations.
Pour cela, l’étudiant procèdera en 4 étapes :
1. Détermination des facteurs influençant la sélection de l’habitat en hiver et en été (step selection analyses, Avgar et al 2016) sur la base des localisations GPS recueillies au cours des deux saisons.
2. Prédiction des domaines vitaux hivernaux et estivaux dans chaque aire de répartition actuelle des populations, ainsi que dans des zones tampons autour de ces aires (la distance étant déterminée en fonction des capacités migratoires du bouquetin).
3. Prédiction des corridors de migration entre les domaines vitaux hivernaux et estivaux (dans les aires actuelles et dans les zones tampons) en utilisant l’approche de Chauveau et al. (2024). Nous considérerons les corridors de migration situés dans les aires de répartition connues des populations comme utilisés, et ceux situés dans les zones tampons comme non utilisés.
4. Analyse des facteurs expliquant l’utilisation ou non des corridors : nous étudierons notamment l’importance relative des facteurs naturels (fonds de vallée, glaciers) et anthropiques (infrastructures de ski, densité d’infrastructures linéaires anthropiques, indice d’empreinte humaine).
Selon les résultats, un projet connexe/complémentaire pourrait consister à identifier les zones les plus favorables (aires hivernales non utilisées, aires estivales non utilisées, corridors de migration non utilisés) afin d’améliorer la connectivité migratoire entre les populations et d’orienter les politiques de conservation.

Références :
Avgar T. et al. (2016) Meth. Ecol. Evol, 7(5): 619-630 ; https://doi.org/10.1111/2041-210X.12528
Biebach I. et al (2010) Con. Gen. 11:527-538; https://doi.org/10.1007/s10592-009-0019-6
Bogliani G. et al (2011) J. Rapt. Res. 45:56-62; https://doi.org/10.3356/JRR-09-69.1
Brambilla A. et al (2020) Mam. Rev., 50(3): 267-277; https://doi.org/10.1111/mam.12194
Chauveau V. et al (2024) Div. & Dist., 30:e13894; https://doi.org/10.1111/ddi.13894
Hirzel A. et al. (2004) J. App. Ecol, 41(6):1103-1116; https://doi.org/10.1111/j.0021-8901.2004.00980.x
Stüwe M. et al. (1991) App. Ani. Behav. Sci. 29:379-387; https://doi.org/10.1016/0168-1591(91)90262-V

Données disponibles : >500 bouquetins suivis par GPS dans 17 populations réparties sur l’arc alpin (initiative Euroibex).

Structure d’accueil : Office Français de la Biodiversité – Direction de la Recherche et Appui Scientifique – Service Anthropisation et Fonctionnement des Ecosystèmes Terrestres, Pérols (34). En liens étroits avec plusieurs partenaires scientifiques français (LECA, CEFE) et internationaux

Contact : Marchand Pascal ; pascal.marchand@ofb.gouv.fr ; 0760884093.

Compétences requises : niveau avancé en analyses statistiques et manipulation de données spatiales sur le logiciel R.

Conditions : stage de 6 mois (à réaliser entre mi-janvier et fin juillet 2024 selon convenances) quasi exclusivement consacré à du travail de bureau (extrêmement peu voire pas de terrain, sauf pour découvrir les captures/suivis) – niveau master 2 recherche ou ingénieur – localisation : OFB – Pérols (34). Gratification selon les règles en vigueur.

Pour candidater : merci d’adresser par mail un CV accompagné d’une lettre de motivation à pascal.marchand@ofb.gouv.fr avant le 15/11/2024.

Le contenu de cette offre est la responsabilité de ses auteurs. Pour toute question relative à cette offre en particulier (date, lieu, mode de candidature, etc.), merci de les contacter directement. Un email de contact est disponible: pascal.marchand@ofb.gouv.fr

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