La diversification végétale pour réduire l’interaction mutualiste entre fourmis et pucerons en vergers de pommiers
Contexte :
Les hémiptères suceurs de sèves font partie des ravageurs les plus importants en agriculture, de par leurs dégâts directs et la transmission de virus phytopathogènes à la plupart des espèces cultivées (Dedryver et al., 2009). Ils sont la cible de nombreux traitements insecticides nocifs pour la biodiversité. Les mesures favorisant la régulation par les ennemis naturels, arthropodes prédateurs et parasitoïdes, sont des alternatives prometteuses à l’utilisation de produits phytosanitaires (Tibi et al., 2022). Cependant, la fréquente relation mutualiste que les pucerons entretiennent avec les fourmis (Yao 2014) constitue un obstacle majeur à leur contrôle biologique (Miñarro et al., 2010 ; Anjos et al., 2022). En effet les fourmis, en échange de miellat, repoussent, perturbent ou tuent les ennemis naturels (Nielsen 2010 ; Detrain et al., 2017, Anjos et al., 2022). L’intensité et la nature de cette interaction varient en fonction des besoins de la fourmilière, qui évoluent au cours des saisons, et des ressources disponibles dans l’environnement. Plusieurs solutions sont à l’étude pour détourner les fourmis des pucerons notamment en verger de pommier et ainsi optimiser l’efficacité des mesures de lutte biologique, comme l’apport de sources de sucres alternatives artificielles (Nagy et al., 2015, Borbély and Nagy 2022). La diversification végétale à l’échelle de la parcelle et de ses abords, comme par l’implantation de plantes de services fournisseuses de ressources alimentaires alternatives aux fourmis, pourrait représenter une solution originale pour modifier les ressources disponibles et permettre de réduire l’interaction fourmis-pucerons (Albert et al. 2017), en plus de favoriser les ennemis naturels (Laffon et al., 2024). La féverole produit du nectar extrafloral et héberge des pucerons producteurs de miellat non ravageurs du pommier, exploité par les fourmis. Ces ressources pourraient détourner les fourmis des pucerons cendrés ravageurs du pommier. L’impact de ces mesures sur la fréquentation des colonies de pucerons par les fourmis et leurs interactions avec les ennemis naturels des pucerons doit être évalué et les conditions d’efficacité déterminées. Le projet Diver’Ant (Ecophyto II+ Diversification, 2025-2028) vise à déterminer les ressources exploitées par les fourmis mutualistes de pucerons dans les parcelles agricoles selon la diversité des sources de nourriture disponibles, et de proposer des mesures de diversification des parcelles agricoles pour détourner les fourmis, et ainsi permettre une meilleure régulation naturelle et une meilleure efficacité des actions de lutte biologique contre les pucerons.
Objectif des stages :
Les 2 stages proposés contribueront à 2 objectifs du projet :
• Décrire la dynamique saisonnière d’exploitation des sources d’alimentation (miellat, nectar, proies) en verger de pommier par les fourmis mutualistes des pucerons, en fonction de la diversité des ressources présentes dans l’aire d’affouragement. Une cartographie des colonies de fourmis et des relevés botaniques à l’échelle de l’aire d’affouragement ou du verger seront effectués pour décrire la diversité des ressources floristiques disponibles pour les fourmis. Des prélèvements réguliers de fourmis seront réalisés pour établir le profil biochimique de l’individu ou de la colonie. Ces profils seront analysés via une méthode d’inférence du statut nutritionnel (Luquet et al., 2020) pour déterminer les sources de nourriture exploitées.
• Déterminer l’effet de l’implantation d’une plante de service, la féverole, sur les interactions fourmis-pucerons. L’effet de la distance à la bande de féverole sur la fréquentation des colonies de pucerons, la survie des colonies, l’abondance des prédateurs et l’intensité du contrôle biologique seront évalués par des comptages réguliers.
Ces relevés et prélèvements seront réalisés de façon identique, en parallèle à Angers, Avignon et Lleida (Espagne). Le mémoire de stage pourra se focaliser sur l’un ou l’autre des objectifs, en exploitant les données recueillies sur les 3 sites.
Le stagiaire aura pour missions :
• Une synthèse bibliographique sur le sujet.
• La participation avec les chercheurs et techniciens, aux campagnes d’échantillonnage et de mesures sur le terrain autour d’Angers ou de Lleida :
• suivi de colonies et comptages de pucerons, de fourmis et d’auxiliaires
• cartographie des fourmilières
• prélèvement de fourmis, préparation et envoi pour analyse
• relevés botaniques
• Le recueil et l’analyse statistique des données
• La rédaction d’un rapport de stage
Profil :
• M2 cursus universitaire en Biologie, Ecologie ou ingénieur/e en Agronomie, Horticulture
• Connaissances fondamentales en écologie végétale et écologie comportementale
• Compétences naturalistes en entomologie et botanique
• Goût pour le travail de terrain
• Compétences en SIG (QGIS)
• Analyse de données sous R
• Permis de conduire nécessaire pour le stage à Lleida
• Espagnol courant nécessaire pour le stage à Lleida
• Rigoureux et organisé
• Capacité de communication et de travail en équipe
Conditions de travail :
• Stage de 6 mois à partir de mi-février/début mars
• Stage basé à Institut Agro Rennes Angers (campus d’Angers), 2 rue Le Nôtre 49000 Angers pour l’un des stages et à IRTA Agronoms Av. Alcalde Rovira Roure, 191, 25198 Lleida, Espagne pour le deuxième.
• Gratification selon la réglementation française en vigueur
Encadrement :
Stage encadré par Benjamin Yguel (benjamin.yguel@agrocampus-ouest.fr) post doctorant sur le projet (IGEPP), et Adeline Bulot, enseignante chercheuse en Ecologie Végétale (BAGAP) pour le stage à Angers et Ainara Peñalver Cruz, chercheuse en Entomologie (IRTA) et Adeline Bulot pour le stage à Lleida.
Candidature :
Envoyer un CV et une lettre de motivation avant le 10 Décembre à Adeline Bulot (adeline.bulot@agrocampus-ouest.fr), Ainara Peñalver Cruz (ainara.penalver@irta.cat), Bruno Jaloux (bruno.jaloux@agrocampus-ouest.fr) et Benjamin Yguel (benjamin.yguel@agrocampus-ouest.fr)
References :
Albert, Laurence. « Régulation naturelle du puceron cendré et aménagements agro-écologiques : l’exemple des vergers cidricoles du nord-ouest de la France ». These de doctorat, Rennes, Agrocampus Ouest, 2017. https://theses.fr/2017NSARA081.
Anjos, Diego V., Alejandro Tena, Arleu Barbosa Viana-Junior, Raquel L. Carvalho, Helena Torezan-Silingardi, Kleber Del-Claro, et Ivette Perfecto. « The effects of ants on pest control: a meta-analysis ». Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences 289, no 1981 (17 août 2022): 20221316. https://doi.org/10.1098/rspb.2022.1316.
Borbély, Csaba, et Csaba Nagy. « Providing Sugar Sources for Ants Improves the Biological Control of Aphis Spp. in Apple Orchards ». Biological Control 175 (1 novembre 2022): 105056. https://doi.org/10.1016/j.biocontrol.2022.105056.
Dedryver, Charles-Antoine, Anne Le Ralec, et Frédéric Fabre. « The conflicting relationships between aphids and men: A review of aphid damage and control strategies ». Les pucerons : modèles biologiques et ravageurs des cultures 333, no 6 (1 juin 2010): 539 53. https://doi.org/10.1016/j.crvi.2010.03.009.
Detrain, Claire, Melanie Fichaux, et François Verheggen. « Tuned Protection of Aphids by Ants against a Predatory Hoverfly ». Ecological Entomology 42, no 3 (2017): 235 44. https://doi.org/10.1111/een.12378.
Laffon, Ludivine, Armin Bischoff, Romane Blaya, Françoise Lescourret, et Pierre Franck. « Spontaneous flowering vegetation favours hoverflies and parasitoid wasps in apple orchards but has low cascading effects on biological pest control ». Agriculture, Ecosystems & Environment 359 (1 janvier 2024): 108766. https://doi.org/10.1016/j.agee.2023.108766.
Miñarro, Marcos, Gabriela Fernández-Mata, et Pilar Medina. « Role of Ants in Structuring the Aphid Community on Apple ». Ecological Entomology 35, no 2 (2010): 206 15. https://doi.org/10.1111/j.1365-2311.2010.01173.x.
Nagy, Csaba, Jerry V. Cross, et Viktor Markó. « Can Artificial Nectaries Outcompete Aphids in Ant-Aphid Mutualism? Applying Artificial Sugar Sources for Ants to Support Better Biological Control of Rosy Apple Aphid, Dysaphis Plantaginea Passerini in Apple Orchards ». Crop Protection 77 (1 novembre 2015): 127 38. https://doi.org/10.1016/j.cropro.2015.07.015.
Nielsen, Charlotte, Anurag A. Agrawal, et Ann E. Hajek. « Ants defend aphids against lethal disease ». Biology Letters 6, no 2 (23 avril 2010): 205 8. https://doi.org/10.1098/rsbl.2009.0743.
Tibi, Anaïs, Vincent Martinet, Aude Vialatte, Audrey Alignier, Valérie Angeon, David Bohan, Douadia Bougherara, et al. « Protéger les cultures en augmentant la diversité végétale des espaces agricoles. Synthèse de l’expertise scientifique collective ». Report, INRAE, 2022. https://doi.org/10.17180/awsn-rf06.
Yao, Izumi. « Costs and Constraints in Aphid-Ant Mutualism ». Ecological Research 29, no 3 (2014): 383 91. https://doi.org/10.1007/s11284-014-1151-4.
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