Evaluation du niveau de microplastiques dans les eaux maltaises (Méditerranée centrale) et leurs impacts sur des espèces marines ciblées en conformité avec la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM – 2008/56/CE)
Kristina Edwards
145C, Rue de la prairie
74330 Epagny
France
Nash74 (at) hotmail.fr
Résumé
La pollution marine représente un des enjeux environnementaux préoccupants à l’heure actuelle. En effet, la quantité de déchets dénombrés en mer est très élevée et présente des risques sanitaires environnementaux et humains non négligeables. Parmi ces polluants, l’observation de particules de plastique dans la colonne d’eau, dans le sédiment et/ou dans les organismes marins, est quasiment perpétuelle. Ce phénomène est particulièrement observable en mer Méditerranée qui, malgré une faible superficie (1% de la surface totale des océans), concentre 30% du trafic maritime mondial et une pression littorale très forte liée à la démographie et activités anthropiques développées sur ses côtes. Allsopp et al., (2006) ont d’ailleurs estimé que 290 milliards microplastiques flottent à la surface du bassin méditerranéen !
Par conséquent et également par manque de connaissances scientifiques dans ce domaine de recherche, les objectifs généraux de mon projet de recherche pour une évaluation de l’état de l’écosystème marin méditerranéen sont de :
(i) quantifier et qualifier les microplastiques couramment trouvés dans l’environnement marin et côtier ;
(ii) déterminer la distribution spatio-temporelle de ces microplastiques dans la région centrale méditerranéenne ;
(iii) caractériser les interactions entre ces particules et différents organismes marins;
(iv) définir une échelle de priorités d’action pour les décideurs politiques et promouvoir ce projet environnemental auprès de tous.
Pour cette étude, 5 plages de sable situées dans l’Archipel de Malte ont été sélectionnées selon différents critères (accessibilité, activités économiques, Aire Marine Protégée ou non, présence de certains organismes marins etc.).
Au total, 100 échantillons de sable ont été prélevés (période estivale) durant les campagnes de terrain selon une méthode de transects-quadrats (20 échantillons/ plage sableuse; Figure 1).
Cette méthode consiste à répartir uniformément 5 lignes perpendiculaires au rivage (transect), séparées par minimum 5 m. Sur ce transect, deux quadrats métalliques de 50cm x 50 cm sont respectivement placés à 0 m et 10 m. Puis, selon un protocole rigoureux, et prenant en considération le risque de contamination à chaque instant, 2 échantillons de sable/quadrat sont récoltés afin d’être analyser en laboratoire par la suite.
Justifications
Le milieu marin représente une source et une ressource essentielles pour la population humaine d’un point de vue écologique, sanitaire et socio-économique. Il participe à la régulation du climat, fournit de l’oxygène, nourrit, soigne et permet le développement d’activités anthropiques, parmi d’autres avantages. Malgré cela, d’importantes lacunes sont identifiables :
– manque de connaissances scientifiques;
– mesures de gestion inefficaces et non-durables;
– manque d’action et d’investissement manifestes (sur le court, moyen, et long termes) face à ce phénomène de dégradation et pollution de l’écosystème marin;
Afin de combler ces lacunes, la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DSCMM- 2008/56/CE) a été mise en place pour atteindre un Bon Etat Ecologique (BEE) d’ici 2020 via la création de descripteurs environnementaux qui déterminent ce BEE (European Parliament, 2008). Le Descripteur 10 traite exclusivement de la pollution marine et doit être considéré par tous les Etats Européens. Il se définit par « les propriétés et les quantités de déchets marins ne provoquent pas de dommages au milieu côtier et marin » (MEDDE, 2012).
De plus, depuis la création du plastique (matériau totalement artificiel), la production mondiale n’a cessé de croître depuis les années 1950 car ce dernier possède de nombreux avantages (e.g. ergonomie, prix). Cependant une mauvaise gestion des déchets, une pression des activités humaines fortes, tout ceci combiné à un manque d’information, entraînent des impacts négatifs, plus ou moins importants, directs ou indirects, sur l’environnement marin et côtier et donc par extension, sur la population humaine. Il devient donc urgent d’évaluer ces impacts sur les écosystèmes marins en conformité avec la DSCMM.
Méthodes
Dans un premier temps, le profil du site d’étude est établi selon des critères environnementaux et socio-économiques (e.g. facteurs anthropiques, caractéristiques physico-chimiques et morphologiques). Dans un second temps, la phase d’échantillonnage débute lors de conditions météorologiques favorables. Celle-ci consiste à dérouler un mètre métallique perpendiculairement au rivage sur plusieurs mètres en direction du fond de plage (Galgani et al., 2013).
Puis, deux quadrats métalliques 50 cm x 50 cm sont déposés à 0 m et 10 m. Les coordonnées GPS de chaque quadrat sont enregistrées.
* Une première phase consiste à prélever 250 ml de sable dans un récipient en verre en évitant tout risque de contamination (Figure 1).
* Une seconde phase consiste à filtrer grâce à deux tamis superposés (1 mm et 5 mm) l’ensemble du sable restant au sein du quadrat (wet sieving dans un seau métallique rempli d’eau de mer), sur une profondeur de 5 cm afin de récolter uniquement tous les éléments organiques et inorganiques situés dans une certaine gamme de taille (Figure 2).
Par la suite, le contenu du tamis 1 mm est précautionneusement transféré sur une compresse stérile via l’utilisation d’un entonnoir métallique. Tout est soigneusement rincé dans le but d’omettre aucune particule au cours du procédé.
Enfin, la compresse stérile est délicatement placée dans une boîte de Pétri en verre et finalement mise dans un sachet de congélation zippé, étiqueté de façon appropriée.
La dernière étape consiste à transporter les échantillons au frais dans une caisse d’aluminium jusqu’au laboratoire où ils seront conservés dans un freezer à -20°C en attendant l’analyse (Figure 3).
Résultats et discussion
La phase d’analyse de ces échantillons est actuellement en cours. Tout d’abord, le profil sédimentaire a été établi pour chaque site d’étude. Cela signifie que la granulométrie du sédiment, ainsi que la perméabilité et la porosité ont été mesurées (Figure 4-7). Ces paramètres physiques sont indispensables pour tenter de comprendre en parti la présence et la dynamique des particules de plastique. La porosité (%) se définit par la capacité des matériaux à stocker des fluides ou des gaz grâce à la présence de pores et/ou fissurations de différentes tailles.
La perméabilité (ml/s) correspond à la capacité des matériaux à laisser passer les fluides (telle que l’eau de mer) ou les gaz.
A l’exception de St George’s Bay, la plupart des plages étudiées sont majoritairement constituées de sable moyen et fin selon l’échelle de Wentworth (Figure 5). Quant à St George’s Bay, les grains de sable sont classés dans la catégorie des sédiments grossiers, voire de gravillons. Cela s’explique par le fait que cette plage est totalement artificielle avec du sable importé de Jordanie et donc présente des caractéristiques sédimentaires différentes des autres sites. Tous les sédiments analysés sont plus (StGB-Mt) ou moins perméables (e.g. Għ-Mt) avec une porosité relativement non négligeable.
Actuellement l’analyse des échantillons se concentre sur les Larges Microplastiques (LMPs – ø 1 mm à 5 mm) (Van Cauwenberghe et al., 2015). Cette phase consiste à effectuer un tri visuel et méticuleux des particules de plastique dans des conditions environnementales contrôlées (i.e pas de contamination de l’air et de l’équipement utilisé). Puis, ces particules sont isolées, au moyen de pinces à épiler très fines et d’une loupe, dans une boite de Pétri en verre afin de procéder au dénombrement et à la description de chacune (i.e. couleur, taille, forme, type) (Galgani et al., 2013).
Cependant, pour l’instant, il n’est pas possible de fournir plus de résultats puisque des analyses supplémentaires sont nécessaires afin de déterminer l’état des plages maltaises concernant les LMPs en 2015. Par ailleurs, la prise des limitations de ces méthodes (terrain et laboratoire) est également à prendre en compte et est en cours de modifications afin d’apporter des améliorations potentielles.
Références
ALLSOPP M., WALTERS A., SANTILLO D., JOHNSTON P., (2006). Plastic debris in the World’s oceans. 44 pp.
EUROPEAN PARLIAMENT., (2008). Directive 2008/56/EC of the European Parliament and of the Council of 17 June 2008 establishing a framework for community action in the field of marine environmental policy (Marine Strategy Framework Directive). Official Journal of the European Union. 22 pp.
GALGANI F., HANKE G., WERNER S., OOSTERBAAN L., NILSSON P., FLEET D., KINSEY S., C. THOMPSON R., VAN FRANEKER J., VLACHOGIANNI T., SCOULLOS M., MIRA VEIGA J., PALATINUS A., MATIDDI M., MAES T., KORPINEN S., BUDZIAK A., LESLIE H., GAGO J., LIEBZEIT G., (2013). Monitoring Guidance for Marine Litter in European Seas. MSFD GES Technical Subgroup on Marine Litter (TSG-ML). DRAFT REPORT, 120 pp.
HIDALGO-RUZ V., GUTOW L., THOMPSON RC., THIEL M., (2012). Microplastics in the marine environment: A review of the methods used for identification and quantification. American Chemical Society. Environmental Science & Technology. 16 pp.
MINISTERE DE L’ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’ENERGIE (MEDDE)., (2012). Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM) – Définition du Bon Etat Ecologique pour les sous-régions marines françaises. 48 pp.
VAN CAUWENBERGHE L., DEVRIESE L., GALGANI F., ROBBENS J., JANSSEN CR., (2015). Microplastics in sediments: A review of techniques, occurrence and effects. Marine Environmental Research. Elsevier Ltd. 13 pp.
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