Contact: Jean-Louis Durand (jean-louis.durand@inrae.fr)

 

La première réunion du groupe thématique Ecophysiologie des Populations s’est tenue le 19 février 2020 à l’Université de Poitiers avec la participation de 16 personnes issues de disciplines diverses (physiologie végétale, paléontologie, génétique – amélioration des plantes, écophysiologies végétale et animale, écologie évolutive…).

o Introduction
Au-delà des relations entre un individu et son environnement biotique et abiotique, l’écophysiologie des populations s’intéresse à la variabilité intraspécifique et au sein des populations. Chaque individu de chaque population a une dynamique propre qui dépend de son patrimoine génétique en interaction avec son environnement local. Cet environnement local est lui-même notamment constitué par les individus voisins, de la même espèce ou pas, partageant les mêmes ressources et donc décisifs dans l’évolution génétique de la population. Dans cette acception, l’écophysiologie des populations devient donc évolutive.
Ainsi, le groupe thématique s’intéressera à l’écophysiologie d’une population au sens de l’ensemble des individus d’une espèce vivant ensemble et se reproduisant entre eux. Il chercherait à comprendre les propriétés de cette population en fonction de deux dynamiques : La plasticité des individus (à population constante) versus l’évolution de la population (qui peut dépendre de la plasticité variable d’un individu à l’autre).

o Synthèse de la discussion
Les participants ont balayé ces concepts dans leur discipline, écophysiologie végétale, animale, génétique quantitative, biologie des populations, amélioration des plantes, physiologie végétale, paléontologie, …

L’écologie aborde la communauté comme un système relativement stable dans le temps. De même l’hypothèse de distribution libre idéale est à la base de certains travaux. Nous cherchons ici à comprendre ce qui perturbe et fait évoluer les communautés et ce qui met en jeu la distribution des espèces, la dynamique de leurs populations, la sélection au sein de ces populations et la plasticité des individus. Si en principe ces questions sont posées depuis Haeckel et Darwin et si ces questions sont abordées en théorie depuis longtemps (travaux de Mark Kirkpatrick par exemple dans les années 80-90 ), les progrès méthodologiques récents en écophysiologie et en génétique changent la donne. En écophysiologie, la hiérarchisation des ressources pour lesquelles les individus sont en compétition et leur mesure est relativement aboutie. La mise au point de modèles mécanistes individu-centrés basés sur les processus est également très avancée dans le cas de l’écophysiologie végétale, alors que de telles approches sont embryonnaires et moins consensuelles en écophysiologie animale. En génétique quantitative, l’identification génomique des individus qui peut s’appliquer maintenant à moindre coût à des centaines d’individus pour des centaines de milliers de marqueurs sur l’ensemble de leur génome est disponible pour de nombreuses espèces. En revanche, le passage de la séquence génétique au phénotype reste largement une boîte noire et il n’est toujours pas possible de déduire le devenir d’un individu dans une communauté de la séquence de son ADN d’une part, et de la description de son environnement d‘autre part.
Parce qu’aucune des disciplines mobilisées isolément n’y suffit, l’écophysiologie des populations relève ainsi d’une démarche essentiellement multidisciplinaire.

o Un intérêt appliqué
Outre l’avancement propre des connaissances dans chaque discipline, qui rend possible des croisements autrefois hors de portée, un certain nombre d’éléments de contexte suggèrent des applications qui mobilisent l’écophysiologie des populations. Notons en particulier les changements d’environnement d’origine anthropique qui rendent nécessaire une vision dynamique des évolutions des communautés, des espèces et des populations, ainsi que les contextes de foresterie et d’agriculture où l’utilisation des biodiversités semée, implantées et naturelles émerge comme un des leviers importants de la transition écologique.

o Echelles, processus, méthodes
Les échelles clefs de ces approches concernent l’organisme, la population, l’espèce, la communauté. La réflexion intègre des échelles temporelles variées, de la dynamique à court terme des individus dans la communauté (quelques minutes) aux temps longs de l’évolution des espèces (105 années). La valeur adaptative du génotype d’un individu dépendant de celle des individus voisins, l’écophysiologie des populations considère la population voire l’espèce comme des niveaux pertinents de sélection au même titre que l’individu. De manière générale, le couplage d’échelles de la variation biologique (variation individuelle au sein d’une population, variation génétique au sein d’une communauté) apparaît au cœur de la démarche envisagée

Des éléments de méthodes sont apparus comme stratégiques dans le développement de ces approches avec les modèles de simulation, notamment individu-centrés, et l’établissement de normes de réaction explicites pour les relations entre les variables du milieu et la réponse des organismes. L’écophysiologie des populations appelle en plus à réfléchir différemment les plateformes de phénotypage et les observations massives de variables biotiques et abiotiques à l’échelle de l’individu dans la population ou la communauté.

o Un nouveau nom pour le groupe
Il est ressorti de la discussion qu’il serait pertinent de nommer le groupe thématique « écophysiologie évolutive des populations » (population evolutionary ecophysiology) ou bien “écophysiologie des populations et évolution” (population ecophysiology and evolution) afin de marquer cette évolution par rapport aux définitions originelles. Le caractère fondamentalement pluridisciplinaire du groupe est ainsi affirmé, puisque qu’aucune discipline ne peut, à l’aide de ses seules approches, résoudre l’équation du changement de la valeur des caractères adaptatifs à l’environnement d’une génération à une autre.

o Appel à contributions.
La pandémie avait interrompu l’élan autour de ce travail d’animation mais les recherches en écophysiologie des populations et leur évolution n’ont fait que se développer depuis.
Afin de relancer dès que possible les échanges sur la thématique de l’écophysiologie des populations et leur évolution, les membres de la SFE2 peuvent dès maintenant faire part de leur intérêt.